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THINK TANK entre la vocation internationale de Bruxelles et la qualité urbaine locale telle que nous la souhaitons. Cela implique entre autres de définir comment éviter que l’UE s’installe dans la ville comme elle l’a fait jadis. Heureusement, de nombreux Européens sont devenus dans l’intervalle des Bruxellois qui s’intéressent à ‘leur’ ville autrement qu’à un simple lieu de travail. Et la démographie ? La population va augmenter dans les années à venir et il s’agira de loger tous ces gens. Il reste à savoir si cela doit absolument se faire à l’intérieur de la ville. La densification doit-elle se limiter aux limites administratives de Bruxelles ou peut-elle se concevoir aussi dans les communes périphériques ? Celles-ci font de facto déjà partie de la ville et elles en dépendent. Je pense donc qu’il faudra se poser ce genre de questions, à l’avenir. La Zone du Canal figure parmi les projets les plus visibles qui vous occupent actuellement. Quels sont les objectifs ? La Zone du Canal constitue une grande friche industrielle où l’on pourrait loger beaucoup de monde. Il faut pourtant penser à y installer aussi des entreprises, moyennes et petites, faute de quoi on rejette l’emploi local hors de la ville. Le Plan Canal s’efforce donc de densifier, de construire des logements et de maintenir les entreprises. Je ne parle pas de ces ateliers branchés où l’on développe des apps ou qui font de l’impression en trois dimensions. Non, je veux y voir un plombier, une menuiserie, une parqueterie... Bref, le genre d’activités dont la ville aura toujours besoin et qu’il ne faut pas exiler dans l’une ou l’autre zone PME en périphérie. Et puis, bien des jeunes qui ont été formés à ces métiers habitent en ville. Les petites entreprises sont nécessaires. Il faut de l’espace à la fois pour le logement, le travail et les loisirs. Ces diverses fonctions doivent s’imbriquer les unes dans les autres et notre défi dans la Zone du Canal consiste à les réunir. Tour & Taxis figure aussi à votre agenda. Oui, avec une problématique assez similaire et un dossier qui s’éternise. Il est vraiment temps de passer à l’action. L’accumulation des retards provoque immanquablement une perte de qualité. La dynamique s’étiole et on commence à tolérer des compromis pour faire avancer les choses. Une démarche à éviter à tout prix. On parle aussi de plusieurs projets de centres commerciaux. Qu’en pensez-vous ? Je ne suis guère enthousiaste. J’aime la ville et je trouve que c’est aussi là qu’il faut aller faire ses courses, plutôt que dans un shopping center démesuré. Les autorités font d’ailleurs preuve d’incohérence : d’une part, elles veulent rénover et oxygéner le centre-ville et d’autre part, elles approuvent ce genre de projets. J’ai aussi des doutes quant à la pertinence du concept de ‘shopping-expérience’. Voilà près de 10 ans qu’on essaie de nous faire croire que c’est particulièrement innovant. Est-ce toujours cela que les gens attendent ? Bruxelles a résolument l’ambition de se rénover de manière réfléchie. Puisque la volonté est présente, passons aux actes. Mais soit, s’il faut y passer, autant construire un shopping center plus ou moins relié à la ville plutôt qu’au milieu de nulle part. J’ai donc un peu plus de sympathie pour Neo que pour Uplace. Neo offre des possibilités d’accès plus réalistes pour les transports en commun. Bruxelles a subi quelques déconvenues urbanistiques majeures dans les années 60 et 70. Les cicatrices en sont toujours visibles. La ville va-t-elle en guérir un jour ? Cela demandera du temps et pas mal de travail à consentir dans les meilleurs délais. La rénovation urbaine de Bruxelles semble systématiquement faire appel à de petites techniques de guérilla, depuis quelques années. Nous sommes à un tournant et il faut passer à la vitesse supérieure, mais sans orgueil. Après tout, la ville est ce qu’elle est. Nous voulons tous une cité sûre, vivable et bien ordonnée. Pourtant, lorsque nous nous rendons en Italie ou à Istanbul, nous nous disons charmés par cette forme de chaos qui y règne. Je veux dire par là que si tout est trop ordonné, la ville perd de son intérêt. Bruxelles est une ville quelque peu ébréchée, mais c’est ce qui la rend passionnante. ● BECI - Bruxelles métropole - mai 2015 15

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