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TOPIC Jardiner au travail DURABILITÉ Profiter de sa pause pour jardiner un peu, planter, arroser, désherber… permettrait de réduire le stress tout en favorisant l’agriculture urbaine. Outre-Atlantique et en France, la tendance est bien implantée. Quid en Belgique ? Gaëlle Hoogsteyn A ux États-Unis, le phénomène est tel que l’on parle « d’orthithérapie ». Toyota, PepsiCo, Kohl, Google, Yahoo et bien d’autres incitent leurs employés à consacrer une partie de leur pause au jardinage. Mettre les mains dans la terre pour ensuite savourer les fruits de son travail serait une activité relaxante, susceptible d’améliorer le bien-être des salariés, pour un coût minime. En Europe aussi, les corporate gardens se font petit à petit une place. Et en Belgique ? Elise Gillet (Thon Hotel), explique : « Au milieu de notre hôtel, nous disposons d’un grand patio. Plutôt que d’y planter un simple jardin, nous avons décidé d’y installer également un coin potager. Nous disposons de plusieurs bacs pour les fruits et légumes (potirons, tomates, poivrons, groseilles, etc.) et d’autres pour les herbes aromatiques. L’entretien est entièrement géré par le personnel, du semis à la récolte, en passant par l’arrosage. Personne n’est obligé de participer, mais nous constatons que c’est une activité très appréciée. Ce que l’on récolte est utilisé par le bar ou le restaurant de l’hôtel. Nous proposons ainsi des potages, confitures et salades issus de notre potager. Leur provenance est indiquée sur notre carte. Mais, davantage que la récolte, l’objectif est surtout éducatif : avec ce potager, nous essayons de sensibiliser notre personnel et nos clients au fait que, chez eux aussi, ils peuvent cultiver des aliments. » Encouragé par ce succès, le Thon Hotel a été plus loin en installant deux ruches. « Pour des raisons de sécurité, elles sont gérées par la Société Royale des Apiculteurs de Bruxelles. L’an dernier, nous avons récolté près de 80 kilos de miel qui a été proposé au petit-déjeuner de l’hôtel. » Pierre Léger, Eco-Conseiller au Village Partenaire : « Il y a 3 ans, nous avons créé un potager dans notre cour intérieure. Travaillant dans un environnement tout en béton, nous avons opté pour 12 bacs d’agriculture. Leur gestion est confiée aux entreprises du site. Chaque entrepreneur y plante ce qu’il veut et nous profitons ensemble de la récolte. Nous récoltons environ 30 à 50 kilos de légumes chaque année, mais l’aspect production est secondaire. Nous souhaitons 38 BECI - Bruxelles métropole - juin 2016 avant tout permettre aux entrepreneurs de faire connaissance autour d’une activité informelle et se détendre un peu sur leur lieu de travail. » Le côté original de ce potager, c’est l’aquaponie : « Nous élevons des poissons. L’eau des aquariums sert d’engrais aux légumes, puis, une fois filtrée, elle retourne dans les aquariums. Chaque année, nous élevons ainsi 10 kilos de poissons, utilisés pour un grand repas collectif. » Au Thon Hotel, la récolte est servie au bar ou au restaurant. Entreprises, ouvrez la voie ! Au vu de ces deux exemples, on se demande pourquoi les entreprises sont si peu nombreuses à se lancer… Pour Cédric Jules, co-fondateur de Macadam Gardens, une start-up toulousaine spécialisée dans les potagers urbains, beaucoup de sociétés se laissent décourager par la structure de leur bâtiment. Une erreur, selon lui : « Toit plat, jardin, terrasse… tout est possible. Même sur des petites surfaces, on peut concevoir de beaux projets. » Autre frein : la pollution. « Mais en ville, elle est surtout constituée de métaux lourds qui ne montent pas à plus de 5 mètres du sol. En hauteur (sur nos buildings bruxellois par exemple), pas de risque de contamination. » Enfin, le climat belge décourage également. « Il est vrai que la qualité des récoltes dépend de l’ensoleillement. Mais, même avec un climat tempéré, toutes sortes de fruits et légumes peuvent être cultivés. Il suffit de bien sélectionner. » Des associations telles que Lateral Thinking Factory soutiennent ce type d’initiatives. En 2013, elle a réalisé pour l’IBGE une étude sur le développement de l’agriculture urbaine à Bruxelles et identifié une série de sites potentiels. L’association Le Début des Haricots a lancé un projet pour aider les entreprises qui souhaitent créer un potager. Cédric Jules conclut : « Ces dernières années, nous constatons un véritable regain d’intérêt pour le jardinage et le ‘home-made’. Plus que jamais, les gens se soucient de ce qu’il y a dans leur assiette. Les potagers d’entreprise pourraient donc avoir de beaux jours devant eux. » ● PHOTO R.A.

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