SPEAKER’S LE MOIS ÉCONOMIQUE ET SI MA TEMPÉRATURE TOMBAIT À MOINS DE 36° ? Sans en revenir aux physiocrates, on ne peut s’empêcher de penser que certaines lois de la nature sont dangereusement bafouées. | Jean Blavier Votre serviteur n’aurait jamais imaginé que la Réserve fédérale puisse un jour perturber son homéostasie. Pas directement, mais par contagion : c’est toute la communauté financière qui est en ébullition à cause de la banque centrale américaine. Comme dans le phénomène de capillarité qui fait que lorsqu’on trempe son sucre dans son café, il (le sucre) devient noir – et pas l’inverse. La question se résume donc à ceci : qui domine ? Désolé pour la réponse, c’est la Réserve fédérale. Pauvres b... Non, ceci n’a rien à voir avec Baudelaire. Pauvres b... = pauvres bourses. Au pluriel. Gordon-Shapiro ? Au rayon des accessoires. Les plus-values ? Taxées parce qu’assimilées à de la spéculation (mais pas déductibles quand elles mutent en moins-values). La durée minimum de placement ? 5 à 7 ans autrefois, au moins 10 ans aujourd’hui, sinon le risque est trop élevé. L’analyse graphique ? Pour les geeks. L’analyse fondamentale ? Pour les papys. Le rapport cours/bénéfice ? Aux orties ! La valeur intrinsèque ? Kekseksa ? Le rendement ? Ah, ici, attention : si le rendement est votre motivation pour aller en bourse, c’est que vous êtes tombé sous le charme de la vénéneuse Tina (« There Is No Alternative »). En fait, la Bourse ne réagit plus à ses stimuli naturels, sauf un : le loyer de l’argent. Quand la Réserve fédérale dit qu’elle va remonter ses taux, la bourse baisse – et inversement. À quoi joue-t-on ? Franchement, quel est encore l’attrait du spectacle si le terrain de foot n’est plus qu’un Colisée où la Réserve fédérale joue à César, le pouce levé ou abaissé, avant que s’affrontent d’obèses investisseurs institutionnels, ces « zinzins » qui travaillent à la nanoseconde et qui DOIVENT placer une partie des capitaux énormes qu’ils collectent à travers les contrats d’assurance, les fonds de placement et le « private banking ». On entend parfois certains financiers avouer (dans des moments de lucidité) que la bourse n’a plus rien à voir avec l’économie réelle. Le décor et les rôles ont changé : si, autrefois, les boursicoteurs étaient ces adeptes du sport financier toujours prêts à tirer profit des imperfections du marché, aujourd’hui ils sont coincés entre le marteau et l’enclume, comme des cadres de grosses boîtes, le métier le plus dangereux du monde. Grand corps malade Lorsque la température d’un patient tombe à moins de 36°, c’est aussi inquiétant que lorsqu’elle grimpe au-delà de 38°. C’est une loi de la nature. Sur les marchés financiers, le thermomètre, ce sont les taux d’intérêt. Ils n’ont cessé de baisser. Avec quelques sursauts, certes. Mais le médecin de service, en l’occurrence la Réserve fédérale américaine, accompagnée de son infirmier en chef, la Banque centrale européenne, n’arrête pas de diagnostiquer : « Ça va remonter ». Comme ce n’est manifestement pas le cas, il suffit de dire que « OK, ça ne va sans doute pas remonter tout de suite » pour que la bourse exulte, comme soulagée. Si demain, comme certains le prédisent, la banque centrale américaine devait décider de passer aux taux négatifs, la bourse exploserait. Et après ? Contrairement à ce que croient certains, des taux d’intérêt plancher n’ont rien de naturel. Cela ronge les revenus des rentiers que nous sommes tous à travers nos contrats d’assurance de groupe, nos placements à revenus fixes et nos comptes d’épargne. Imaginez ce qu’il adviendrait si le loyer de l’argent devenait négatif. Vous vous voyez, vous, payer chaque année des taux d’intérêt au lieu d’en toucher ? Nous n’avons vécu jusqu’ici qu’une brève expérience des taux négatifs, avec pour résultat que les institutionnels hurlent dans toutes les langues qu’ils ne peuvent plus payer les taux garantis de nos contrats d’assurance. Nous avons déjà payé, nous allons encore payer si les taux, pardon, si la température du grand corps malade qu’est l’économie mondiale devait descendre à moins de 36°. ● CORNER Créez votre entreprise en 45 min. chrono ! Rendez-vous personnalisé et gratuit à notre guichet d’entreprise au J Numéro d’entreprise J TVA J Caisse d’assurances sociale 02 643 78 09 J Mutuelle J Assurances www.beci.be/guichet BECI - Brussels Business - novembre 2015 7
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