THINK TANK POUR OU CONTRE Des tarifs modulables à la SNCB ? La gestion dynamique des tarifs est une pratique de plus en plus répandue dans les compagnies aériennes, les hôtels, à la SNCF, mais aussi dans les parcs d’attractions... Pour ou contre son application à la SNCB ? Les avis divergent. Gaëlle Hoogsteyn Xavier Tackoen, administrateur délégué, Espace Mobilité La gestion dynamique des tarifs émerge dans tous les domaines. Ouvrir le débat à la SNCB est très positif mais, pour l’instant, on parle surtout de faire payer plus cher à l’heure de pointe. Or, selon moi, ce n’est pas la bonne solution : en Belgique, grâce au tiers-payant, la majorité des employés de grosses entreprises ne payent pas leur abonnement de train. Voir les tarifs augmenter ne serait en aucun cas une motivation pour eux, mais un poids financier pour l’entreprise. Je pense que la solution doit plutôt aller dans l’autre sens. Entre 9 et 15 h, les trains sont très peu utilisés. Diminuer l’offre de prix durant cette tranche horaire pourrait avoir un effet d’appel et inciter davantage de gens à utiliser le train et faire augmenter les recettes. Un exemple réussi est celui de Singapour. Les personnes qui arrivent avant 7h45 en semaine voyagent gratuitement et les voyageurs prenant le métro entre 7h45 et 8h se voient offrir une remise sur leur billet. Suite à cette expérience, 8 % des usagers ont changé leur horaire de déplacement. Naturellement, cette démarche n’a pas été sans effet sur l’organisation du travail. C’est pourquoi un programme de consultance a été mis sur pied pour aider les entreprises, et des primes leur ont été offertes pour amorcer la dynamique. À Londres, une campagne de communication a aussi été menée. Les usagers ont été informés de l’heure à laquelle leur station était la plus utilisée. En avançant ou en reculant leur départ de 15 minutes, ils pouvaient gagner beaucoup en confort. Cela a permis de faire sortir 5 % des voyageurs des heures de pointe. La tarification modulaire peut être un outil efficace à condition de s’inscrire dans une politique globale. Seule, elle n’est pas suffisante pour orienter la demande. Aujourd’hui, des modèles de travail plus souples, fondés sur l’autonomie, et la flexibilité des horaires se développent. Il y a une demande importante, principalement chez les jeunes travailleurs. Mais cela peut impliquer des changements dans l’entreprise et c’est pourquoi il faut des programmes d’accompagnement. Jan Vanseveren, porte-parole de TreinTramBus Afin de promouvoir la tarification modulaire, Jo Cornu, CEO de la SNCB, cite souvent l’exemple de la France. Mais la situation en France (de par sa taille) est tout à fait différente de celle de la Belgique. On ne peut pas comparer le TGV Paris-Marseille avec un train Bruxelles-Ostende. En France, le concurrent du train est l’avion. En Belgique, c’est la voiture. Dans l’optique d’une tarification variable, le client pourrait avoir un tarif moins cher s’il réservait à l’avance ou s’il choisissait un train spécifique en heure creuse. Le problème est qu’en fonctionnant ainsi, on perd en flexibilité. Le voyageur peut alors être tenté de prendre plutôt sa voiture qui, elle, est toujours disponible devant la porte de sa maison. On risque de perdre les voyageurs attachés à la flexibilité. Une diminution des tarifs en heure creuse pourrait éventuellement attirer des voyageurs supplémentaires. Le problème est qu’aujourd’hui, quand on parle de tarification variable, c’est plutôt dans le sens d’une augmentation du prix en heure de pointe. Pour ceux qui bénéficient d’un abonnement via leur entreprise, cela ne changera rien. Mais pour tous les travailleurs pour lesquels ce n’est pas le cas et également pour tous les étudiants, cela serait un poids financier en plus et cela créerait encore davantage d’inégalités. Je pense que la SNCB doit plutôt repenser sa tarification en général si elle veut attirer plus de clients. Par exemple, il existait autrefois un tarif réduit pour les petits groupes (maximum 5 personnes). Ce tarif a été supprimé. Dès lors, aujourd’hui, si une famille ou un groupe d’amis veulent passer une journée à la mer ou dans les Ardennes, cela leur revient moins cher de prendre une seule voiture que 5 billets de train. Les tarifs du train en Belgique sont loin d’être les moins chers d’Europe, contrairement à ce que prétend M. Cornu. 8 BECI - Bruxelles métropole - novembre 2015 Donnez-nous votre avis
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