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Entreprendre Faillite et différences culturelles : petit tour d’horizon Malgré la mondialisation et une économie de plus en plus transversale, l’image et l’acceptation de l’échec entrepreneurial varient considérablement d’un pays à l'autre, comme l'explique Marco Herreman, expert en intelligence culturelle, auteur d'un article sur le sujet dans le cadre du programme reStart. Selon la culture, la vision de la faillite peut aller de l’étape vers la réussite à un échec définitif. méfiance l’empêchent de se relancer. D epuis toujours, la faillite a été stigmatisée. Dans la Grèce antique déjà, celui qui ne pouvait honorer ses emprunts était condamné à être « esclave par la dette », au service de son créditeur jusqu’à extinction de la dette. C’était malgré tout un statut privilégié, puisqu’il mettait à l’abri des sévices physiques infligés aux autres esclaves. En Asie, sous le règne de Gengis Khan, celui qui tombait en faillite à trois reprises était carrément condamné à mort. De nombreux autres exemples de punition de la faillite et d’humiliation publique du failli existent dans toutes les parties du monde, et à toutes les époques. La culture impacte la vision de la faillite Aujourd’hui encore, dans de nombreux pays, notamment en Europe continentale, la faillite reste associée à quelque chose de honteux, de déshonorant et de méprisable. Dans les pays qui partagent cette vision, tout concourt à culpabiliser le failli : les lois sont plus sévères, les amis prennent leurs distances, les clients et fournisseurs deviennent méfiants... Pour les banques, c’est encore pire : le failli est fiché sur liste noire. Pour lui, c’est un cercle vicieux car toutes ces sanctions et ce sentiment de 46 ❙ Bruxelles Métropole - novembre 2019 Heureusement, d’autres cultures, États-Unis en tête, considèrent l’échec comme une voie naturelle vers la réussite, à condition toutefois qu’elle permette d’apprendre de ses erreurs. Cette vision favorise le dynamisme économique et permet au failli de mettre plus rapidement ses talents au service d’un nouveau projet. Peu à peu, cette mentalité gagne les autres continents, même si le changement est progressif. Les États-Unis, pionniers du rebond Pourquoi cette différence de vision de la faillite ? Pour comprendre l’attitude des Américains, souvenons-nous d’abord que les États-Unis ont initialement été peuplés de colons européens, débarquant sur la côte Est. Très rapidement, ils sont partis à la conquête de l’Ouest, massacrant les Amérindiens au passage. Ces colons étaient pour la plupart des gens pauvres, prêts à tout pour améliorer leurs conditions de vie. Ceux qui s’élançaient vers l’Ouest et ses promesses de richesse étaient des audacieux, prenant des risques élevés pour aller de l’avant. Parallèlement, le colon devait être capable de se débrouiller seul en toutes circonstances, ce qui a forgé l’esprit d’initiative et d’entrepreneuriat. Des siècles plus tard, cet esprit de conquête et de prise de risque reste central à la culture américaine. Aujourd’hui encore, les USA cultivent l’idée du self-mademan, capable d’atteindre les sommets en partant de rien. Là-bas, on estime qu’un failli s’est enrichi en expérience et qu’il augmente ainsi ses chances de réussite pour ses prochaines tentatives. Le failli n’est pas un pestiféré, mais un gagnant en devenir. Pas question toutefois de répéter les mêmes erreurs, mais bien d’adopter des © Getty

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