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approches innovantes. Certains prétendent même qu’un entrepreneur ne réussit vraiment qu’à son troisième essai. La législation, l’accès aux capitaux, les encouragements des proches… Tout contribue à faciliter l’entrepreneuriat et la prise de risque. Le Royaume-Uni a une vision de la faillite et du rebond assez similaire à celle des États-Unis. Tenter, échouer, recommencer, réussir… La subtilité de la vision asiatique De l’Inde au Japon, la perception de la faillite résulte d’un subtil équilibre entre différents traits culturels. En Asie, l’entrepreneuriat a globalement une image très positive. Toutefois, en cas de faillite, les choses se compliquent. En effet, l’entrepreneur a un engagement moral envers ses salariés. Ces derniers se dévouent sans compter pour assurer la prospérité collective. En contrepartie, le chef d’entreprise doit garantir l’emploi. La faillite rompt cet accord tacite et est vécue par le personnel comme une forme de trahison. Autre trait marquant lié à la culture asiatique : l’obsession de ne jamais perdre la face. La faillite est donc considérée comme particulièrement offensante pour le failli, mais aussi pour toute sa famille. L’auto-culpabilisation est ici plus forte que dans d’autres parties du monde, même si la globalisation tend aussi à relativiser ces comportements : le failli japonais se réfugie dans la honte, mais ne fait plus hara-kiri comme le lui dictait autrefois la tradition. Comme partout dans le monde, ce sont les jeunes générations qui incitent à des changements de mentalité, pour tendre vers des modèles observés à l’étranger. La vieille Europe, en route vers le changement ? En Europe, grâce à la mutation de l’Union Européenne, la perception de la faillite évolue vers une vision qui se rapproche progressivement de celle des ÉtatsUnis. Et c’est une nécessité si l’on souhaite éviter une hémorragie de talents européens vers des pays où la prise de risques est mieux perçue et acceptée. Depuis 2007 déjà, la Commission Européenne recommandait aux États membres de mettre en place des mesures pouvant aider les faillis à rebondir. Ces mesures portent notamment sur la valorisation des entrepreneurs de la seconde chance dans les médias, la déstigmatisation de l’échec dans les programmes éducatifs, l’adoption de lois distinguant les faillites frauduleuses de celles qui ne le sont pas, ainsi que sur la mise en place de soutiens financiers, psychologiques et techniques pour aider les entrepreneurs à rebondir. Le rebond, enfin facilité en Belgique La situation en Belgique est en pleine évolution, mais le chemin reste long pour atteindre les scores de rebond anglo-saxons. Au point de vue législatif, la loi sur l’insolvabilité, entrée en vigueur en mai 2018, facilite le rebond. L’ancien système « d’excusabilité » a été remplacé par l’effacement complet du solde de la dette. Le failli de bonne foi peut ainsi rebondir plus facilement et plus rapidement. En 2019, la réforme du code des sociétés allège par ailleurs significativement les formalités et contraintes à la création d’entreprise. La nouvelle SRL (société à responsabilité limitée), qui deviendra la norme, n’impose plus de capital minimal. Les lois progressent donc dans le sens de la deuxième chance. Toutefois, les mentalités doivent encore évoluer pour que le failli ne se sente plus stigmatisé, puisse se recentrer sur un nouveau projet professionnel durable, trouver des sources de financement et mettre ses talents et son expérience à profit. L’échec entrepreneurial reste encore trop souvent associé à la faillite frauduleuse, alors que la majorité de celles-ci résultent plutôt d’un concours de circonstances frappant un entrepreneur honnête mais malchanceux. Comment favoriser le rebond ? Le rebond ne sera possible que si le failli peut effectuer un travail de reconstruction psychologique, analysant les causes de l’échec passé, les conditions permettant d’éviter une récidive, une analyse objective de ses forces et faiblesses, la définition d’objectifs de vie... Le failli peut alors passer à la seconde phase de son rebond : créer un nouvel avenir professionnel. C’est cela qui permettra aux faillis d’aujourd’hui d’être les créateurs d’emploi de demain. ● Gaëlle Hoogsteyn Pour aider les entrepreneurs faillis, de plus en plus de structures d’aide au rebond voient le jour. Chez Beci, en collaboration avec la Région de Bruxelles-Capitale, le programme reStart aide les entrepreneurs en faillite à rebondir. Contact : Eric Vanden Bemden, Conseiller reStart 02 563 68 56 - evb@beci.be Bruxelles Métropole - novembre 2019 ❙ 47 © Getty

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