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Grow Your Business innovante en 2020, il faut placer directement la barre suffisamment haut. Si vous n’avez pas l’intuition que vous pourrez générer un chiffre d’affaires d’un milliard d’euros à long terme, ce n’est pas la peine de vous lancer. » Du capital pour deux mois Au début, tout n’a pas été rose pour notre tête brûlée belge en Californie. Au bout d’un an, sa start-up avait consommé plus d’un million de dollars et le premier gros contrat se faisait toujours attendre. Sans doute la combinaison d’une confiance aveugle dans sa technologie et d’une témérité juvénile l’a-t-elle sauvé. « Nous avions en fait un peu d’avance sur le marché. Le problème n’était pas encore suffisamment préoccupant pour convaincre les entreprises d’investir dans notre plateforme. Puis, nous nous sommes rendu compte que nous avions encore du capital pour deux mois, au maximum. Nous avons alors carrément préparé un scénario de faillite complet. Nous avions un seul client qui nous payait, alors que nous étions sur le point de couler. C’était Delta Airlines, qui n’acceptait toutefois pas d’être cité. J’ai harcelé cette entreprise de coups de téléphone, jusqu’à ce qu’elle accepte que nous réalisions une vidéo de relations publiques. Nous avons joué le tout pour le tout et investi la moitié du capital restant dans un film promotionnel mentionnant Delta Airlines. Bingo ! Quelques semaines plus tard, deux autres compagnies avaient signé un contrat et nous prenions notre envol, avec la possibilité d’obtenir en outre de nouveaux investissements. » squ’il se remémore cette période difficile, M. Kestens donne ce conseil aux entreprises en croissance : prévoyez de faire un grand pas en avant beaucoup plus tôt. « Nous avons par exemple élaboré pour Cake un modèle financier qui prévoit 250.000 utilisateurs belges d’ici la fin de l’année. C’est déjà du costaud, mais dans Si vous n’avez pas l’intuition que vous pourrez générer un chiffre d’affaires d’un milliard d’euros à long terme, ce n’est pas la peine de vous lancer. Davy Kestens l’intervalle nous avons aussi établi un autre modèle, qui vise un demi-million de clients dans le même délai. C’est terriblement ambitieux, mais j’ai appris qu’en tant qu’entreprise, il faut se fixer des défis extrêmes et oser placer la barre très haut. » Gérer ses limites Davy Kestens a décidé de revenir au pays à la mi-2018. Sparkcentral employait déjà plus de 100 collaborateurs et comptait dans sa clientèle des grandes entreprises B2C telles que Delta Airlines, Netflix, Western Union et T-Mobile. Depuis plusieurs années déjà, M. Kestens n’était plus CEO, une décision qu’il affirme n’avoir jamais regrettée. « À un moment donné, et sous l’impulsion de mon conseil d’administration, j’ai décidé d’engager un CEO externe. Pendant la croissance de l’entreprise, j’avais déjà constaté que j’étais davantage un entrepreneur qu’un manager. Ce qui m’anime, c’est de développer de nouveaux concepts ou des idées à commercialiser. Or, d’autres préoccupations finissent par s’imposer dans le développement d’une telle entreprise : le besoin de compétences opérationnelles, la gestion du personnel etc. J’ai découvert à San Francisco que je n’excelle pas dans ce domaine-là. Notre nouveau CEO est rapidement parvenu à hisser notre entreprise à un niveau supérieur. De nombreux entrepreneurs n’en prennent pas conscience. Pourtant, la présence d’un bon conseil d’administration vous apprend à tenir compte de vos propres limites. » M. Kestens avait bien retenu la leçon lorsqu’il a décidé, fin 2018, de créer une nouvelle entreprise en Belgique. Il s’est entouré dès le début de cinq cofondateurs et a choisi de ne pas trop s’occuper des aspects opérationnels. « Je m’occupe surtout de la vision stratégique à long terme et je cherche des clients potentiels et des investisseurs. » Il a décidé en outre que Cake ne suivrait pas le mode de croissance classique des start-up technologiques. « Elles découvrent une idée intéressante ou une technologie innovante, écrivent du code et puis se mettent à la recherche de clients potentiels. C’est assez aléatoire, avouez. J’ai fait la même chose auparavant, avec Sparkcentral, et le hasard a voulu qu’un marché en forte croissance soit né précisément à ce moment-là pour ce type de produit. Aujourd’hui, j’estime qu’une telle démarche est inappropriée. Il faut d’abord définir quels problèmes on va résoudre avant de développer un prototype et de créer une entreprise. Il faut savoir à l’avance quel besoin on veut satisfaire. Nous n’avons pas voulu lancer le développement de logiciels sans avoir au moins une commande. Nous avons aussi impliqué directement les clients. Cette démarche garantit qu’il y a une série d’entreprises bien décidées à payer pour la technologie. Nous n’avions pas encore lancé Cake que nous disposions déjà de six contrats signés. Une bonne start-up qui présente un fort potentiel de croissance doit en outre pouvoir s’appuyer sur une équipe senior expérimentée. Ce n’est que lorsque toutes ces conditions sont rencontrées qu’une telle entreprise Bruxelles Métropole - mars 2020 ❙ 25 © Debby Termonia

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