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Idées ne connaissaient pas – et ils avaient des avis assassins, contrairement à leurs trois concurrents directs situés à moins de 30 mètres ! » T.G. : « Il y a encore des entreprises qui pensent que ce n’est pas nécessaire, et puis il y a le ‘mal faire’. Ce n’est pas simple. C’est même relativement compliqué. En digital, la variance est plus grande. Le risque est surtout de ne pas être attentif. Si un concurrent ouvre une succursale en face, tout le monde est sur le pied de guerre. On fait de la promotion, on surveille les prix... Si c'est un webshop qui ouvre, rien ne se passe. J'étais au CA d'une grosse PME, où on me disait faire du digital et avoir un conseiller, mais 5 % du temps seulement a été consacré au digital et 50 % à l'inventaire ! Peter Hinssen, le gourou flamand du digital, dit qu'il faut penser au ‘day after tomorrow’. Au lieu de s'occuper d'aujourd'hui, ou pire, des misères du passé, il faut penser à ce qui va se passer demain, et pas seulement dans un budget. Aujourd'hui, on délègue le futur à l'un ou l'autre collaborateur, voire à un consultant. En digital, la consultance doit servir à augmenter le savoir des entreprises. Pour avoir la maîtrise de la chose, il faut en développer une certaine compréhension. » Est-ce que vos formations peuvent suffire à impulser ce changement de perspective ? T.G. : « On a fait 5 millions de formations en Europe et près de 90.000 en Belgique. On s'est par exemple focalisés sur les jeunes en Espagne, parce qu'ils souffrent d'un taux de chômage élevé, et sur es PME en Belgique, parce qu'elles ne captent pas le potenAutant les Belges sont hyperconnectés, autant les entreprises belges ne le sont pas du tout. Thierry Geerts tiel. On forme des chefs d'entreprise, des responsables marketing ou des directeurs informatiques, et on essaie de changer leur façon de regarder le monde digital. Mais cela devrait commencer dès l’école primaire. Si en Belgique il y a plein d'initiatives mises en œuvre par des enseignants, des ASBL ou des parents motivés, il n'y a rien dans les programmes. On apprend aux enfants à traverser la rue, mais on a construit l'autoroute de l'information à côté et on ne leur explique pas comment l'emprunter. » O.W. : « On vit une transforma tion de l'économie. Il faudrait former 600.000 personnes à Bruxelles en dix ans. Aujourd'hui, je consulte tous les différents acteurs, publics comme privés, pour voir comment faire. La grande difficulté : c'est la première transition qui n'est pas concrète, pas liée à une machine. Avec le digital, on s'est détachés de l'ordinateur. Il ne suffit pas d'être présent sur le net. Il faut savoir pourquoi, comment et aligner toute son organisation derrière. Ce débat est stratégique. Olivier Willocx La question est de savoir comment penser. Avoir du data ne sert à rien, c'est capter le trafic qui est intéressant. La possession n'est plus grand chose. On enseigne toujours aux étudiants les modèles théoriques de l'offre et de la demande. Il n'est pas dérangeant de passer une heure dessus car, pour comprendre les nouveaux modèles, il faut commencer par les plus simples. Aujourd'hui, il y a bien équilibre sur des marchés, mais à des secondes déterminées en fonction des adresses IP et de la politique de prix des concurrents. On a besoin de gens capables de comprendre ces modèles compliqués. Des universités s'adaptent, d'autres pas. » Si la Belgique est en retard, pourquoi croire que Bruxelles a les capacités pour devenir la capitale de Digitalis ? T.G. : « Faire des petits pas est plus compliqué que d'avoir une grande ambition. C'est ce que Kennedy a fait dans les années 60 en décidant d'aller sur la Lune. Si on dit en Belgique, comme l'a fait le précédent gouvernement, qu’on va gagner deux places dans le ranking digital des pays, on en perdra deux. En disant ‘On va faire l'Expo IA Bruxelles 2020’, on inspire tout le monde, pas seulement les politiciens qui auront des objectifs ambitieux, mais aussi les universités et les entreprises. L'ULB et la VUB sont au top au niveau mondial et on a beaucoup de laboratoires d'IA à Bruxelles. » O.W. : « Les Belges sont très modestes, mais on a énormément de contacts extérieurs. On n’a nulle part ailleurs dans le monde autant de compétences linguistiques et de gens aussi formés. » ● Ophélie Delarouzée Bruxelles Métropole - janvier 2020 ❙ 17 © Reporters © Reporters

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