FOCUS ÉNERGIE La révolution énergétique en marche doit s'accélérer Les évolutions technologiques dans le renouvelable vont révolutionner le marché de l'énergie. Le challenge actuel est celui de leur implémentation dans le réseau. Ophélie Delarouzée L e monde de la recherche est en ébullition ces dernières années pour déclencher la transition énergétique. Les technologies vont continuer à évoluer, mais elles ont déjà atteint un certain degré de maturité qui les rend exploitables dans le domaine industriel. Complexité nouvelle du réseau Avec cette transition énergétique, les frontières s'amenuisent entre les différents secteurs de l'énergie. L'ensemble des acteurs sont appelés à penser conjointement la complexification du réseau, qui deviendra multidirectionnel et interconnecté. « La digitalisation de notre société est un grand défi », souligne Menno Janssens, responsable pour l'innovation chez Elia. « Avec toutes les nouvelles technologies, on va devoir changer l'ADN de la société. Les simples flux unidirectionnels vont faire place à un écosystème complexe avec des flux entre voisins et avec les GRD (Gestionnaires de Réseau de Distribution). Il va y avoir une décentralisation de la production énergétique avec les particuliers qui disposent de panneaux solaires, et il y aura des régionalisations avec des parcs solaires dans le sud de l'Europe et des centres de production éoliens dans le nord. Même si la Belgique n'a que 60 km de côte, elle a quand même un site offshore de classe mondiale. » Dans ce cadre, Elia démarre actuellement un test pour évaluer les apports de la technologie « blockchain », une base de données partagée sans intermédiaire par ses différents utilisateurs, qui contient l’historique de tous les échanges effectués. Gérer les intermittences La Belgique abrite par ailleurs l’un des deux seuls systèmes en Europe qui permettent de faire de la simulation hardware « in the loop », pour aider à la gestion des réseaux basse et moyenne tension. L'un se trouve à Aix-laChapelle, en Allemagne, et l'autre à EnergyVille (Genk), dans le cadre de la collaboration de recherche appliquée, tournée vers la transition énergétique, qui regroupe les universités de Leuven et Hasselt ainsi que les partenaires privés Vito et Imec. « Il est impossible pour nous, en tant que centre de recherche, d'implémenter de nouvelles technologies et de pouvoir les tester en ‘live’ dans le réseau. Ce qui bloque, c'est la décision politique et la législation en place », pointe Serge Peeters, spécialiste du « e-storage » et responsable Business and Relationship Development pour EnergyVille. « On va devoir travailler avec des vitesses de commutation beaucoup plus élevées. Il nous faut des temps de réaction de l'ordre de la milliseconde et aujourd'hui, on en est très loin. On doit arriver à être au moins 100 à 1000 fois plus rapide pour gérer les problèmes d'intermittence. Imaginez des centaines de milliers de points d'énergie qui se superposent à un réseau, qui disparaissent et apparaissent à des moments non coordonnés et qui varient très rapidement. On doit mettre en place différents mécanismes pour gérer cette variabilité sur le réseau. Pour lisser les crêtes, la solution est de compenser par un apport énergétique extérieur. » Le défi majeur du stockage Le gaz ou le nucléaire vont constituer ce back-up dans les prochaines années, mais le stockage des énergies renouvelables est primordial pour le futur. « Avec le renouvelable, il y a des moments où tout le monde produit et d'autres où personne ne produit », poursuit Serge Peeters. « Quand on est en surproduction, on désaccouple du réseau les éoliennes ou les panneaux photovoltaïques. Il est donc nécessaire d'avoir des solutions de stockage décentralisées, mais aussi localisées, au pied des éoliennes par exemple. Différentes technologies de stockage sont déjà disponibles – batteries lithium-ion ou encore stockage BECI - Bruxelles métropole - juin 2018 45 © Thinsktock
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