THINK TANK ENTRETIEN AVEC HERVÉ HASQUIN « L’Europe peut relancer le dynamisme économique à Bruxelles » Ancien ministre-président de la Fédération Wallonie-Bruxelles, ex-recteur de l’ULB, ex-ministre bruxellois dans les années 90, Hervé Hasquin dresse sa vision de notre capitale. Parmi les points à améliorer : la mobilité et la propreté. Géry Brusselmans À 75 ans, l’historien et homme politique Hervé Hasquin n’a toujours pas sa langue en poche. L’un des fondateurs, au début des années 90, de la Région de Bruxelles-Capitale, fervent défenseur de l’Europe, pointe une série de problèmes, notamment au niveau de la mobilité, la propreté et la complexité politique. Il livre à Bruxelles Métropole quelques pistes de solution. Bruxelles Métropole : Estimez-vous que les attentats ont plombé l’image de Bruxelles ? Hervé Hasquin : Pour fréquenter régulièrement les restaurants, les cinémas et certaines salles de spectacle, je n’ai pas le sentiment que l’image de Bruxelles ait été plombée par les attentats, hormis les premiers mois qui ont suivi le drame. L’amnésie est beaucoup plus grande qu’on l’imagine. Un Belge ou un touriste qui passe par Bruxelles ne pense pas forcément aux attentats. Ceux qui ont vécu les événements de près sont toujours marqués, mais ce n’est pas la majorité. Certes, un secteur comme l’hôtellerie a été plombé, mais il s’est redressé depuis. Vu dans sa globalité, l’état actuel de Bruxelles est donc satisfaisant ? Bruxelles m’insupporte de plus en plus. J’y ai résidé 35 ans et j’ai été ministre bruxellois entre 1995 et 1999. En 1999, j’aurais pu être Ministre-Président de la Région de Bruxelles-Capitale. Un an avant les élections, j’ai eu une discussion avec Louis Michel, le Président de parti de l’époque. Je lui avais dit que la ville serait ingouvernable à cause de sa complexité : il y a 19 communes, 19 chefs de police, 19 règlements d’urbanisme… Il faut se poser la question de qui gère la ville. La Région ou les communes ? Bruxelles oublie également qu’elle est la capitale du pays et qu’elle a des obligations envers la Flandre et à la Wallonie. La ville vous semble donc moins attractive que par le passé ? Je ne pense pas qu’elle soit moins attractive : les grands musées et les commerces sont toujours là. Le problème vient notamment de la mobilité. J’habite à Silly, à 45 km de la capitale. Je mets chaque année plus de temps pour arriver en ville. La mobilité y est désastreuse, la faute entre autres à Pascal Smet mais pas seulement. Il manque une réelle coordination des travaux entre le fédéral, la Région et les communes. On veut supprimer 12 BECI - Bruxelles métropole - mai 2018 Les problèmes des travaux à Bruxelles viennent de l’absence de coordination entre les communes, la Région et le fédéral. des places de parking, on vous barre la route partout. Comme alternative, les Belges plébiscitent de plus en plus des villes comme Lille, Valenciennes ou Maubeuge. Comment redoreriez-vous le blason de la ville à l’étranger ? Si l’aéroport de Zaventem fonctionne bien et qu’il y a beaucoup de liaisons, les touristes viendront beaucoup plus dans la capitale. Prenez l’exemple de Liège. Vous rencontrerez beaucoup de Chinois car il y a des liaisons. Il existe par ailleurs une culture anti-européenne au sein du Parlement bruxellois et même chez certains ministres. C’est pourtant l’Europe qui fait vivre notre capitale ; les Européens ont un pouvoir d’achat considérable. Bruxelles doit également être beaucoup plus propre. Il y a un vrai laisser-aller, particulièrement au centre-ville. Il y a eu également des erreurs politiques, notamment autour du deal, que je résumerais en « Je te donne le terrain de football et tu me laisses faire le piétonnier » (à propos de la polémique autour de la construction du futur stade national et du projet de piétonnier lancé par Yvan Mayeur, ex-bourgmestre bruxellois, ndlr). © Reporters
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