ENTREPRENDRE TRANSITION Le travail adapté, parce que vous le valez bien Certaines entreprises bruxelloises font le pari de collaborer avec des personnes handicapées intégrées au sein d’Entreprises de Travail Adapté (ETA). C’est notamment le cas de L’Oréal. Johan Debière C’ est au détour du déménagement de son QG vers Berchem-Sainte-Agathe que L’Oréal a noué ses premiers contacts avec Manufast, une ETA bien connue en Région bruxelloise, qui permet depuis plus de cinquante ans à des personnes handicapées de s’épanouir en effectuant des tâches d’assemblage de documents ou de produits, de conditionnement et de déconditionnement, de mise sous film de produits, de montage de displays... Très vite, les commandes tombent : stockage temporaire de marchandises, envoi de produits à des clients, photocopies en grands tirages, réalisation de « duo-packs », remplissage de présentoirs... « Aujourd’hui, L’Oréal représente 5 % du chiffre d’affaires de Manufast », explique Brigitte Hamtiaux directrice générale de l’ETA. Sans doute l’origine française du groupe de cosmétiques explique-t-elle cette sensibilité. Comme nous l’a confirmé le directeur d’une autre grande ETA bruxelloise, il est significatif de relever que « certaines banques ou certaines compagnies d’assurance belges persistent à ne pas faire publiquement étalage de collaborations avec des ETA ». À cet égard, les campagnes de communication orchestrées par la fédération des ETA, la Febrap, devraient inverser la tendance grâce à un discours positif et intelligent. Les raisons qui poussent les entreprises à collaborer avec les ETA ne sont pas « honteuses » : on ne fait pas d’économie en travaillant avec une ETA. « Les prix pratiqués sont ceux du marché », confirme Marc Willocx, le directeur de l’APAM, une ETA située à Uccle. Les entreprises qui recherchent les prix cassés se dirigent plutôt vers les pays à bas salaires. Une situation qui pourrait s’améliorer un peu grâce au droit : « Le groupe parlementaire Défi dépose en janvier une proposition d’ordonnance au Parlement bruxellois, concernant l’obligation de respecter les quotas pour les communes bruxelloises », indique Michaël Lans, le porte-parole de la Febrap. « Le texte devrait permettre de comptabiliser les marchés exécutés par les ETA dans le calcul du quota. » Acteurs de l’économie urbaine C’est heureux car la présence de ces entreprises particulières à Bruxelles présente de grands atouts : « Les ETA possèdent des infrastructures de production et de stockage au cœur de la ville. Elles permettent d’activer toute la dynamique de retour de la production en ville, soutenue par les concepts d’économie circulaire », argumente M. Lans. Pour sa part, Brigitte Hamtiaux souligne le nombre important de travailleurs handicapés qui peuvent, 42 BECI - Bruxelles métropole - janvier 2017 à travers les ETA bruxelloises « exercer une activité professionnelle, en retirer un revenu décent et continuer à vivre sur le territoire de la Région ». Très bien, mais combien de personnes handicapées pourraient-elles ainsi être aidées à travers la mise à disposition d’un travail adapté à Bruxelles ? « C’est difficile à dire. Les recensements de personnes handicapées à qui l’on pourrait proposer de travailler dans une ETA ne sont pas aussi précis qu’on pourrait le penser », soulève Brigitte Hamtiaux. « Ce que l’on peut dire », complète Michaël Lans, « c ’est qu’à Bruxelles, les ETA rassemblent 1.450 personnes présentant des handicaps physiques ou mentaux, encadrées par 400 professionnels qualifiés ». Un contingent limité à l’enveloppe que la Cocof est en mesure d’octroyer sous forme de subsides à l’embauche de personnes handicapées. Cette situation « inconfortable » pousse toutefois les ETA bruxelloises à se remettre sans cesse en question, en proposant des services toujours plus poussés. Il est d’ailleurs significatif de constater qu’outre les personnes handicapées, les ETA emploient aussi, de plus en plus souvent, des travailleurs (handicapés ou non) formés à des métiers très spécifiques : programmeurs, spécialistes de l’IT, du marketing direct... « C’est une manière positive de nous positionner face à des concurrents jouant sur le seul facteur du prix », relève Brigitte Hamtiaux. « Notre mission », conclut-elle, « c’est avant tout de maintenir l’emploi. Investir dans de la technologie n’a de sens que si elle permet de générer des jobs où le moins-valide aura sa place. » ● Info : Hayate El Aachouche, Conseiller Diversité Beci he@beci.be, 02 643 78 34. Voir aussi : www.onsadapte.be © Manufast
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