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FOCUS ‘lean’, en leur imposant de remplir les cases d’un business model canvas : cela oblige à formuler des hypothèses sur le marché, les besoins du consommateur, les contraintes techniques, etc. » Des hypothèses qui doivent ensuite être validées rapidement en commençant par les plus critiques. « Et dans le cas de la Sabca, les ingénieurs voulaient commencer par créer un prototype pour vérifier la résistance de tels ou tels matériaux, ce à quoi nous avons répondu qu’il valait peut-être mieux vérifier que des clients seraient susceptibles d’acheter un tel avion avant d’engager de grosses dépenses de conception », sourit Philippe Lemmens. « Même avec des grands comptes, on peut utiliser des outils de base de la méthode ‘lean’, comme le ‘smoke test’, où l’on crée une page web présentant une solution et demandant au visiteur s’il pourrait être intéressé de l’essayer, alors même que la solution n’existe pas encore… Cela permet de sonder le marché et d’éviter de mettre de lourds processus en marche, parfois inutilement. » Un véritable engagement Pas question, par contre, de prendre la démarche à la légère : « Cela doit faire partie de la stratégie de l’entreprise, il ne s’agit pas d’un quick fix. » Et pour cause, les consultants créent généralement des équipes de 3 ou 4 salariés de l’entreprise (ceux qui sont au contact du terrain et des clients), qui doivent être libérés en moyenne deux jours par semaine pendant plusieurs semaines. « Et là, parfois ça coince au niveau du middle management, qui n’y voit qu’une perte de ressources. » Mais, à l’issue de cette première session durant laquelle l’équipe va à la rencontre des clients et « émet », les salariés vont présenter leurs hypothèses/conclusions au management. « Ce qu’il faut comprendre, c’est que les outils théoriques, que les entrepreneurs utilisent souvent uniquement au début de leur projet, sont souvent très puissants et exploitables à différentes étapes de la vie d’une société, parce qu’il est toujours question des mêmes choses : identifier un marché cible, les besoins des consommateurs, les processus les Quatre « pilotes de startups », de gauche à droite et de haut en bas : Luc De Brabandere, Philippe Lemmens, Jean-Baptiste Escoyez et Michel de Kemmeter. plus efficaces et éviter le gaspillage de ressources à tous les niveaux. » Et de citer, encore une fois, l’exemple du business model canvas à remplir avec ses hypothèses critiques, afin de bien les identifier et les trier par priorité ou par importance de risque. « C’est un outil que l’on peut utiliser tant en interne qu’en externe », affirme Philippe Lemmens. Plus délicat pour les PME Même lorsqu’il s’agit de repenser les process internes d’une entreprise, une méthodologie lean peut ainsi être utilisée en remplissant les cases du business model canvas, non pas avec des hypothèses sur les clients potentiels, mais sur le fonctionnement intrinsèque de l’entreprise, les besoins et contraintes de ses différents services et pôles d’activité. « Ces outils ont une portée nettement plus globale, permettent d’aligner et de structurer la communication autour d’un projet de développement », complète Jean-Baptiste Escoyez, serial entrepreneur et coach/consultant de startups depuis plusieurs années. Reste que ces formules restent relativement peu adaptées à la foule d’entreprises qui ne sont ni des startups, ni des grands comptes. « Il est vrai que les PME de quelques dizaines de personnes peuvent difficilement se permettre de libérer plusieurs salariés quelques jours par semaine et qu’elles ont généralement déjà dépassé la phase de pure définition de leur produit/service », concède Philippe Lemmens. Point de fatalisme, par contre, puisque les outils de base de la méthodologie lean peuvent, à cette échelle, encore être exploités par le management. « Nous travaillons d’ailleurs sur un projet pilote avec différents institutionnels, pour justement amener cette logique d’innovation, de flexibilité sur le business model ; l’objectif étant de mettre des outils pratiques à disposition des entrepreneurs déjà un peu plus aguerris ». Une piste pourra toutefois déjà être trouvée du côté du travail de Michel de Kemmeter, qui insiste, dans sa conception d’une entreprise, sur la valeur des actifs immatériels, dont la qualité et la motivation des salariés, mais aussi le niveau de compréhension de l’évolution d’un marché notamment. Une conception certes plus large mais qui porte en elle les éléments pouvant servir, ensuite, de guide d’action en recourant cette fois aux méthodologies pratiques prônées par les théories lean, ou de l’entreprise résiliente. ● BECI - Bruxelles métropole - janvier 2017 31 © R.A. © Reporters © R.A. © Reporters

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