THINK TANK APRÈS LES ATTENTATS DU 22 MARS « Il faut un projet mobilisateur pour Bruxelles » « Bruxelles connaît sa pire crise de l’après-guerre », titrait en avril le quotidien français Le Monde. Sans céder au catastrophisme, il faut reconnaître que les attentats qui ont endeuillé la capitale européenne ont aussi profondément meurtri son économie. Dans la foulée de la campagne Stronger.Brussels, BECI a organisé une rencontre entre les entreprises et le ministre bruxellois de l’Économie, Didier Gosuin. Emmanuel Robert L' émotion était palpable, dans les salons de l’hôtel Métropole où une centaine d’entrepreneurs étaient venus échanger avec Didier Gosuin. Des entrepreneurs parfois désespérés, comme celui-ci qui avouait avoir fermé « une affaire qui tournait depuis cinquante ans ». Selon les estimations de BECI, les entreprises de la Région bruxelloises ont enregistré une baisse de 20 à 40 % de leur chiffre d’affaires depuis novembre. Un tiers de l’horeca et des commerces présenteraient des risques faillite – singulièrement dans le centre-ville. Et 10.000 emplois seraient menacés. Bien sûr, la menace terroriste n’est pas la seule cause de ce marasme. « La souffrance est venue s’ajouter à une souffrance qui était déjà là », soulignait une intervenante. Au lockdown et aux attentats, il faut ajouter depuis janvier la fermeture du tunnel Stéphanie, mais surtout, depuis un an, la mise en œuvre d’un piétonnier qui cristallise désormais les oppositions – comme on a encore pu le constater lors de cette rencontre. « Le politique a sa part de responsabilité », reconnaissait le ministre, conscient que « l’impact est significatif ». « Ce que nous avons mis en place après le 13 novembre s’est révélé insuffisant depuis les attentats du 22 mars. » Certes, des mesures ont été prises ou renforcées. Au fédéral : chômage temporaire, chômage économique, report de cotisations, baisse des paiements anticipés, dispenses… Au régional : suspension de la « city tax », soutien aux trésoreries des entreprises… Ce n’est pas tout : la Région met en place une cellule pour accompagner et faciliter les démarches de financement. Des contacts ont aussi été établis avec le secteur financier pour mobiliser des moyens et créer un « effet de levier », concentré sur les secteurs impactés. Autant de mesures forcément bienvenues. Mais seront-elles suffisantes ? « Nous ne devons pas écarter l’hypothèse pessimiste. Ce qu’on a fait n’est peut-être pas tout-à-fait adapté, il faudra peut-être le revoir ; c’est pourquoi nous avons besoin de mettre en place un monitoring précis. Mais le vrai défi », poursuivait le ministre, « c’est de savoir quand les touristes vont revenir, quand les habitudes de consommation vont se rétablir – et les gens revenir au centre-ville. » 6 BECI - Bruxelles métropole - juin 2016 La rencontre se tenait symboliquement dans les salons de l’hôtel Métropole, en plein centre-ville. L’occasion de repenser nos modèles Relativement optimiste pour le tourisme d’affaires, à moyen terme, Didier Gosuin s’est montré plus inquiet pour le tourisme de loisirs « qu’il faudra renforcer ». Et de plaider pour une coordination des efforts en faveur de l’image de la Belgique et de sa capitale. À cet égard, un intervenant regrettait qu’au fédéral, « il ait fallu que Bruges commence à souffrir pour qu’on s’inquiète du sort de Bruxelles ». Des propos qu’a rejoint Didier Gosuin : « Ce pays n’a pas d’attachement pour sa capitale – c’est vrai au nord comme au sud. Mais on doit comprendre qu’en négligeant Bruxelles, qui est notre moteur économique, on se tire une balle dans le pied. » Reste que les attentats ont cruellement mis en lumière une certaine fragilité de l’économie bruxelloise. Présent dans la salle, le polyentrepreneur Michel De Kemmeter voit la crise comme une occasion de repenser nos modèles : « Pourquoi pas un projet mobilisateur ? Avec la jeunesse, qui a plein d’idées ? » « Vous avez raison », répondait M. Gosuin, « il faut un projet mobilisateur, mais cela ne se fait pas du jour au lendemain. On a lancé Make.Brussels ; des projets arrivent dans les quartiers. Mais au-delà du court terme, il faut une démarche plus importante, plus novatrice. Nous devons la réfléchir, et agir avec nos moyens. » ● Du côté des entreprises, BECI et ses partenaires sectoriels ont lancé Stronger.Brussels, avec un mini-site qui centralise les informations critiques (en matière sociale, fiscale, financière…) pour faire face à la crise. Voir www.stronger.brussels.
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