Bruxelles, ville nouvelle ? Quand on évoque la « ville nouvelle », on fait en général allusion à une agglomération urbaine récente, fraîchement peuplée de nouveaux habitants, et dessinée au cordeau par des urbanistes imprégnés de modèles utopistes. De prime abord, notre agglomération vieille de plusieurs siècles ne rentre pas vraiment dans cette catégorie, mais… À y regarder de plus près, Bruxelles se transforme, quartier par quartier, tronçon par tronçon, d’extension de tram en nouveau complexe commercial. L’année 2015 aura vu la finalisation de quelques projets d’envergure, mais aussi la concrétisation de nombreuses opérations (logement, bureaux, équipements publics, voieries…) architecturalement et médiatiquement moins visibles, mais tout aussi essentielles à la dynamique de la ville (voir notre dossier). En dépit de ces nouveautés, Bruxelles, c’est aussi de la lenteur et des frustrations à l’égard de projets dont on parle depuis des années et dont on attend toujours la mise en œuvre : par exemple la passerelle Picard, qui doit relier les deux rives du canal à hauteur de Tour et Taxis (qui accueille depuis 2015 les employés de Bruxelles Environnement, et doit recevoir 2.600 fonctionnaires flamands), le RER (pardon, le « S-bahn » bruxellois), le réaménagement de la rue de Namur… Au rayon des plans et outils réglementaires (ceux qui viennent en amont des projets eux-mêmes), le très attendu schéma directeur Midi, sensé déterminer le nouveau visage de la gare éponyme. Déchirée entre vision fonctionnaliste et geste architectural (Liège a mis la barre très haut), entre résidentiel et bureau, et tout simplement victime d’un imbroglio fédéralo-régionalo-communal, cette porte d’entrée de notre capitale n’a pas fini de désemparer les touristes, et de désespérer les Bruxellois et les navetteurs. Autant de projets dont l’urgence se fait éminemment ressentir parce qu’ils sont directement liés au talon d’Achille de notre Région : sa mobilité et, par extension, son image. Inutile de revenir sur la douloureuse question du piétonnier, dont on espère vivement que la mise en œuvre concrète se déroulera avec plus de sérénité que la phasetest… Frustration et colère, aussi, de nombreux acteurs confrontés à l’absurdité d’un arsenal réglementaire de plus en plus lourd, et à des administrations (régionales et communales) n’ayant pas assez de moyens pour en assurer un traitement efficace dans des délais raisonnables. Les années à venir nous promettent cependant de considérables changements, tant du point de vue réglementaire que de celui de la mise en œuvre des projets. Ce début 2016 est en effet, pour le gouvernement bruxellois, celui de plusieurs chantiers : révision du Code bruxellois de l'aménagement du territoire (CoBAT), base juridique de l’urbanisme bruxellois, et refonte des structures dévolues à l’aménagement du territoire, tant dans la dimension de l’élaboration stratégique (création du Bureau Bruxellois du Plan) qu’opérationnelle (la Société d’acquisition foncière, anciennement la SAF). Ces nouveaux outils doivent permettre la concrétisation des ambitieux projets du gouvernement Vervoort et répondre aux principaux défis que connait la Région Bruxelloise : création de logements pour répondre à l’accroissement démographique, maintien des activités économiques pourvoyeuses d’emploi, rénovation urbaine comme facteur de cohésion sociétale… Ces ambitions, le gouvernement régional entend les mettre en œuvre dans des espaces qualifiés de « stratégiques », parmi lesquels le territoire du canal (près de 2.509 ha, soit 15,5 % du territoire régional). Mais ce nouvel espace sous les projecteurs ne doit pas nous faire oublier d’autres lieux à fort potentiel, tel le Quartier Nord. Résultat, dans les années ’70, d’une gigantesque opération immobilière très controversée, cet espace recèle un potentiel incroyable et un défi majeur : créer de la mixité fonctionnelle dans des espaces construits pour répondre à une seule fonction : le bureau. Bref, les possibilités d’innover, de repenser la ville et de la faire évoluer sont vastes. Les pages de ce dossier vous offriront un aperçu d’une série de projets en cours et des acteurs, tant privés que publics, qui s’efforcent de penser Bruxelles comme « une ville nouvelle » où beaucoup de choses restent à inventer. ● Lise Nakhlé Conseillère Urbanisme & Immobilier BECI, lna@beci.be – 02 643 78 72 © Jean-Marie Janssens Photography
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