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FOCUS Donc des salles de serveurs gigantesques, comme les data centers de Microsoft et Google notamment, lesquels sont à ce point énergivores que les géants du net les installent dans des pays où le climat est plus froid, comme l’Islande. Même si des progrès importants sont réalisés dans ce domaine, avec notamment le recours à des énergies alternatives. Des progrès d’autant plus importants que le trafic internet ne fait que croître, surtout avec la généralisation du streaming. Autre technologie annoncée comme « verte », la virtualisation des serveurs qui permet de diminuer le nombre de machines physiques pour une capacité de traitement et de stockage constante. En effet, si le nombre de serveurs vendus a bel et bien diminué, ce qui a permet de réduire le coût à l’octet stocké, la demande a ensuite explosé. De même, le recours aux écrans plats de type LCD plutôt que cathodiques CRT devait se traduire par des économies d’énergie du fait d’une consommation moindre. Or dans le même temps, la diagonale des écrans a augmenté (passant en moyenne de 15 à 22’’) tandis que leur luminosité s’est améliorée, entraînant une consommation égale. Pire, la fabrication d’un tel écran LCD émet deux Le progrès apporté par la technologie est souvent annihilé par le changement de comportement qu’il induit. fois plus de gaz à effet de serre, tandis que son recyclage est pratiquement impossible. Enfin, le cloud (nuage) est sans doute l’une des technologies où l’effet rebond est le plus sournois. En effet, cette technologie libère les ordinateurs personnels de leurs logiciels et du stockage pour les déporter vers des data centers, souvent sans que le consommateur en ait vraiment conscience. Car qui sait où se trouvent ses photos, sa musique, etc. sur des plateformes d’Amazon, Google et autres Facebook ? Et comme ces solutions apparaissent gratuites, le grand public a tendance à en user et en abuser. Mesurer, c’est savoir À ce jour, les effets rebond des nouvelles technologies restent trop peu, voire pas du tout, mesurés. Encore faudrait-il disposer d’outils de mesure et des méthodes de comparaison. Mais la première étape consiste à sensibiliser les décideurs. ● Bitcoin : entre mines de charbon et minage de monnaie Si la cryptomonnaie en général, et le bitcoin en particulier, font fantasmer les spéculateurs et donnent au grand public l’impression d’une devise dématérialisée, la réalité de leur empreinte écologique paraît beaucoup plus sombre. Le fonctionnement des cryptomonnaies est basé sur le blockchain, la chaîne de blocs : un fonctionnement de type pair-à-pair où les personnes qui réalisent les transactions sont à la fois clients et serveurs. Pour générer un bitcoin, il faut télécharger un logiciel qui devient un nœud d’un vaste réseau. Chaque transaction doit être vérifiée et validée par tous les nœuds avant d’être disponible dans un espace public (bloc) accessible aux utilisateurs. Tous ces blocs forment donc une chaîne qui sert de registre daté et infalsifiable. Le minage est l’opération qui consiste à créer un nouveau bloc, donc un nouveau bitcoin. Chaque nouveau bloc/ bitcoin créé par un « mineur » est ainsi rémunéré. Mais comme la chaîne devient toujours plus complexe, le minage requiert des ressources informatiques sans cesse plus importantes. Ainsi, les experts estiment que la consommation annuelle du bitcoin correspondrait à celle d’un pays comme la Bulgarie, sachant que la puissance des ordinateurs qui gèrent le bitcoin serait 100.000 fois supérieure à celle des 500 plus gros ordinateurs au monde. Le problème est que le minage du bitcoin se fait essentiellement en Chine, pays où l’énergie est produite à 60 % par le charbon, d’où d’importantes émissions de gaz à effet de serre (on parle de 122 kg de CO2 pour chaque transaction et d’une consommation de 11 millions de tonnes de charbon par an). Autre chiffre interpellant : une transaction en bitcoin dépenserait près de 4.000 fois plus d’énergie que la même transaction par carte bancaire classique. Si le monde semble crier haro sur la Chine, certains défenseurs du bitcoin précisent que l’hydroélectricité s’impose de plus en plus comme source d’énergie et qu’au pire, comme l’électricité surproduite ne peut être stockée, le minage permet de transformer ces kW en jetons numériques, et donc de redistribuer cette richesse. BECI - Bruxelles métropole - juin 2018 49 © Thinsktock

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