39

GESTION DES RISQUES Terrorisme : quelle responsabilité pour l’entreprise ? Face au niveau de menace actuel, les entreprises voient leur responsabilité engagée d’une façon inédite, ce qui suscite des questionnements sur le droit chemin à suivre pour remplir ces nouvelles obligations. La surveillance des employés est en ligne de mire, a fortiori quand le public est large ou les installations sensibles. Ophélie Delarouzée À la suite de l’attaque de Charlie Hebdo, du démantèlement de la cellule de Verviers et des attentats de Paris, le gouvernement fédéral a pris des mesures pour lutter contre le terrorisme. Le screening des services de renseignement a également été renforcé pour les emplois sensibles, qui requièrent un accès aux zones à haut risque comme les centrales nucléaires. Ces enquêtes, gérées par l’Autorité nationale de sécurité, portent notamment sur le passif judiciaire et les signaux de radicalisme du personnel. Mi-mai, le ministre de l’Intérieur Jan Jambon a annoncé que la législation serait modifiée d’ici la fin de l’année pour étendre ces screenings. Des entreprises classées Seveso, des sociétés de transports publics ou encore du secteur pharmaceutique ont été consultées et devront identifier les fonctions sensibles en leur sein. Des affaires médiatisées poussent à agir. Ainsi en octobre, l’écartement d’un conducteur de train en formation chez Infrabel, qui avait masqué son passé de combattant en Syrie et sa récente condamnation avec sursis pour terrorisme. L’affaire a amené le cabinet du ministre de la Mobilité François Bellot à réaffirmer qu’une loi était à l’étude pour renforcer le screening dans les transports ferroviaires. L’an dernier, 122.500 personnes ont été screenées, soit 40.000 de plus qu’en 2015. Que l’État renforce son contrôle des postes sensibles ne décharge pas les entreprises de leur responsabilité, augmentée depuis les attentats. Il leur incombe de déployer une culture de sécurité et de veiller au bon comportement de leurs employés. Christophe Delmarcelle, associé spécialisé en droit social et droit du travail au cabinet Bird & Bird, constate une recrudescence des consultances sur les devoirs en la matière. Il rappelle que l’employeur est Christophe Delmarcelle responsable, par la loi du 4 août 1996, de la prévention des risques : « Beaucoup d’entreprises négligent quelque peu cette loi, qui impose des obligations très lourdes à l’employeur mais aussi aux représentants de la ligne hiérarchique, qui peuvent être tenus personnellement responsables en cas de violation de ses dispositions ». Le respect de la vie privée comme ligne rouge « Il faut faire attention que, sous couvert de lutte contre le terrorisme et de cette obsession sécuritaire, on ne brade pas nos libertés fondamentales, notamment le droit à la vie privée », avertit Alexis Deswaef, président de la Ligue des Droits de l’Homme. Dans son activité d’avocat, Me Deswaef a récemment gagné trois recours pour des travailleurs qui se sont vu refuser le renouvellement de leurs badges d’accès à la suite de screenings, et qui ont en conséquence perdu BECI - Bruxelles métropole - décembre 2017 37 © Thinsktock

40 Online Touch Home


You need flash player to view this online publication