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Gare aux fausses nouvelles ! GESTION DES RISQUES Nous avons tendance à associer les fausses nouvelles (fake news) à des manœuvres politiciennes. Sachez pourtant qu’aux États-Unis, les entreprises commencent à en souffrir à leur tour. Faut-il que nos entreprises restent à l’affût de rumeurs non fondées sur les forums du web ? Peter Van Dyck L es exemples américains ne manquent pas : la pizzeria Comet Ping Pong à Washington a essuyé des tirs, suite à des rumeurs aberrantes selon lesquelles le restaurant servirait de façade à un cartel de prostitution enfantine. Starbucks a été touché par une vague de tweets fantaisistes à propos d’une campagne offrant des frappuccinos et des Xbox gratuits : elle aurait provoqué la mort d’un adolescent devant sa console. Notre pays paraît épargné pour l’instant. « Il est improbable qu’il le reste », déclare Johan Bollen, un scientifique belge, professeur associé à l’Indiana University où il étudie le comportement humain sur les réseaux sociaux. « Prenons l’évaluation de services via une appli telle que Yelp. Rien n’y empêche la diffusion d’avis négatifs dans le but de nuire à des entreprises. » Un système complexe Installé aux USA depuis 18 ans, le chercheur est convaincu que nous sous-estimons les dégâts que les réseaux sociaux et les forums peuvent infliger à des réputations. « Il est en principe possible de faire appel à des centaines de gens pour ébranler des intérêts politiques et économiques par la diffusion de ‘fake news’. Je suis moi-même surpris de la complexité potentielle du système. Outre la faculté de diffuser simultanément des centaines de rumeurs, il est possible de détecter celles qui séduisent le plus et que l’on adaptera par conséquent en vue d’une dispersion virale. On assiste à une sorte d’incubateur en ligne qui s’efforce d’affiner constamment les fausses nouvelles pour en maximiser l’impact sur certains groupes de la population. » Une étude de Johan Bollen et de ses collègues démontre d’ailleurs que l’humeur collective sur Twitter est utile pour prévoir les fluctuations de la bourse. « Nous disposons de millions d’utilisateurs dans nos banques de données de recherche. Nous suivons leurs humeurs et convictions presque au jour le jour et parvenons, après un certain temps, à définir très précisément les profils. D’autres pourraient faire de même, non à des fins scientifiques, mais dans le but de manipuler les gens. » Saboter les cours de bourse La bourse réagit souvent de manière hystérique aux actualités. La diffusion intentionnelle de légendes urbaines pour faire dérailler Les nouvelles sont devenues plus fugaces, et donc plus éphémères. Leur influence peut être rapide, mais leur disparition tout autant, de sorte que les cours se rétablissent très vite. Jeroen Wils (Bepublic) des cours de bourse n’en est que plus facile. « C’est déjà le cas aux USA », constate M. Bollen. « Le président Trump cite souvent des entreprises dans ses tweets, de manière positive ou négative. L’effet est immédiat sur la valeur de leurs actions. Certaines organisations analysent les tweets de Trump à la chaîne, dans l’espoir de dégager un avantage immédiat au moment où Trump dénigre des concurrents. » Jeroen Wils est Managing Director de l’agence de communication Bepublic et expert en communication de crise. Il BECI - Bruxelles métropole - décembre 2017 27 D.R. © Thinsktock

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