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THINK TANK Un chou pour Bruxelles Frappée par les attentats du 22 mars, Bruxelles souffre encore – et ses entreprises avec elle. Mais dans l’adversité, les Bruxellois n’ont perdu ni leur foi en l’avenir, ni leur humour. La preuve par une campagne décalée, fièrement ralliée sous la bannière du chou. Pierre Chaudoir L e 23 mars dernier, notre capitale se réveillait extrêmement triste. Les images nous hantent tous : cela aurait pu être nous. On connaît tous quelqu’un qui était dans la rame précédente ou qui devait prendre un avion. Fascinés par la solidarité des Bruxellois. Fiers même. Mais force est de reconnaître que la résilience collective n’a pas connu le momentum dont nous avions tous envie. Très faiblement, la place de la Bourse a frissonné. Pourtant, tous les Bruxellois rêvaient de leur place de la République. Ils en ont été empêchés. Le secteur horeca souffre – en silence, par respect pour les nombreuses victimes, mais l’heure est grave. Idem pour les théâtres et les salles de spectacle. Tout ce qui est perdu est impossible à rattraper. Tout le monde serre les dents, attend, observe… BECI, IZEO, la Brussels Hotels Association, la Belgian Restaurant Association, le site Brusselslife… Tous accueillent avec bienveillance les appels au secours de leurs membres, clients, sympathisants. Ils font le pied de grue auprès de tous les ministères pour solliciter de l’aide rapide, concrète et forte. Les commerces ne peuvent attendre : le gouffre est devant eux et on leur demande d’avancer… La situation est intenable. Le privé a mobilisé ses propres moyens : BECI et ses partenaires ont créé Stronger.brussels ; un site qui globalise les mesures de soutien aux entreprises et les alternatives au licenciement. Des réunions criantes de vérité et extrêmement émouvantes sont organisées pour les commerçants, via leurs associations, avec l’ONSS, Partena, le Ministre bruxellois de l’Économie, Didier Gosuin, le Premier Ministre… Le journal L’Echo-De Tijd, de son côté, organise une opération très sympathique pour renvoyer tout le monde au 10 BECI - Bruxelles métropole - juin 2016 restaurant en mettant le couvert sous la forme de Make Love not War – et de prendre le tout en photo pour le publier sous le hashtag #diningforbrussels. Une opération à laquelle BECI s’est également associée. Les hôtels bruxellois se rebiffent à leur tour, invitant les clients à se présenter en pyjama dans le lobby d’un hôtel, lors du week-end de l’Ascension, pour ne payer que la moitié du prix. C’est la presse internationale qui se jette sur l’opération : on a retrouvé l’esprit belge ! Zwanzeuse et surréaliste Et puis jaillit le concept Sprout to be Brussels. L’idée, c’est de revendiquer son amour de notre capitale dans l’esprit I Love NY ou I Am Sterdam. Des artistes, des restaurateurs et des commerçants déclinent le programme. Des badges fleurissent sur le revers des vestons de personnalités. Une page Facebook grandit et #sprouttobebrussels apparaît sur les réseaux sociaux. Notre résilience collective s’installe enfin. Voilà Bruxelles comme on l’aime, zwanzeuse et surréaliste – sans doute la seule ville au monde capable d’adopter un légume universellement détesté des enfants (et même des plus grands) pour en faire un emblème. Voilà aussi qui nous éloigne de l’image d’une capitale administrative, d’une place économique ou d’un hellhole (comme l’a dit un candidat à la présidence US dont le nom m’échappe). À Bruxelles, on n’a peut-être pas de Grosse Pomme, mais on a des idées – et des petits choux ! Sprout to be Brussels est, on l’espère, le mouvement qui devrait créer un nouveau lien symbolique entre Bruxelles, ses habitants, ses visiteurs… Redorer un peu son image, lui rendre un peu de sa fierté et lui permettre de repartir sur de nouvelles bases. Vous aussi, plantez un chou pour Bruxelles ! ● Photos R.A.

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