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TOPIC difficiles. Au sein des PME belges, trop peu se donnent le droit de refuser dans un contrat telle ou telle clause, alors que tout est négociable. Il faut donc se départir de ce préjugé que tout est « à prendre ou à laisser », qu'un prix, parce qu'il est affiché, est le seul juste prix. Sur chaque achat, les PME peuvent gagner chaque année des milliers d'euros. Aborder la question du prix « C’est trop cher » : un Néerlandais ne va pas se gêner pour le dire, si c'est ce qu'il pense. Le Belge, au contraire, aura tendance à ne rien dire, alors qu'il aurait intérêt à demander une réduction. Question de mentalité, certainement, mais aussi d'un manque de formation en matière de politique d'achats. Se soucier de préserver la relation avec le fournisseur ne doit pas empêcher de mettre des fournisseurs en compétition, même pour de petits achats. Recevoir des offres extérieures est intéressant, pas forcément pour changer de fournisseur, mais pour, le cas échéant, renégocier ses conditions. Quand une PME organise un dîner du personnel pour 40 personnes, discute-t-elle l'offre ? En fait, très peu le font. Paradoxalement, le plus souvent, ce sont les grands acteurs qui pressent leurs fournisseurs et achètent dans de meilleures conditions, alors que les plus petites structures le font nettement moins. Pourquoi pas les PME ? Sans doute en raison d'un souci excessif de préserver la relation. Non que la bonne relation ne doive pas être prise en compte, au contraire, mais cet aspect ne doit pas constituer un frein pour connaître les conditions de marché, demander d'autres offres et poser la question du prix. Il est assez significatif que des outils et des plateformes très utiles pour trouver des fournisseurs soient, en réalité, sous-utilisés. Un site web comme www.bobex.com permettrait aux PME de gagner au final des montants très importants. Pourquoi une telle frilosité ? Peut-être parce qu'un tel outil oblige à définir de manière claire ce qui est désiré en matière d'achat. Il est tellement plus facile, mais en définitive plus coûteux, de se reporter sur un fournisseur connu, sans avoir suffisamment réfléchi à ce qui va lui être demandé. Les bienfaits de la critique Dans la pratique, une attitude critique envers son fournisseur est profitable à tous, également pour le fournisseur qui est amené à optimiser son service et sa manière de travailler. Prenons un exemple concret : une entreprise constate que la livraison de boissons à l'attention de son personnel est peu efficace (mobilisation d'un ouvrier qui doit gérer et transporter des casiers, alimenter des frigos, etc.) Elle envisage de changer de fournisseur et d'opter pour une autre formule : la machine en libre-service. En réaction, le fournisseur « sortant » propose de redéfinir le travail avec une formule pilote : installation des frigos chez le client et manutention par ses soins ; le fournisseur veille, lui-même, à ce que ces frigos soient toujours remplis. Tout est négociable Une nouvelle solution s'est ainsi mise en place grâce à la critique du client, le fournisseur étant amené à améliorer son service, en phase avec la demande du client. Ainsi, la recherche et l'innovation ne doivent pas uniquement concerner des produits à mettre au point, mais aussi des processus à améliorer. La contestation de la relation client-fournisseur est bénéfique pour l'amélioration du processus au quotidien. La contestation d'un modèle permet de réfléchir au changement. Bien acheter pour bien vendre Le patron de PME, lorsqu'il introduit le changement, est généralement confronté à une résistance de la part de son personnel. Les réactions sont bien différentes lorsqu’il met à contribution ses fournisseurs, établis ou potentiels, en essayant d’obtenir le meilleur du marché. C’est en achetant bien qu’une entreprise est ensuite capable de vendre au mieux, avec une grande qualité de produit. Qu’est-ce qui fait la qualité d’une boutique qui vend des stylos ? Les stylos et la personnalité du vendeur, assurément. Mais ce n’est pas tout. Il faut aussi se demander comment ces boutiques se fournissent, comment elles anticipent la modification des comportements. Or, cette information se trouve chez les fournisseurs. Petit exemple qui illustre ce propos : le site web qui fonctionne sur le principe « dessine toi-même ton propre t-shirt ». Fort d’un beau succès, le concepteur a perçu un nouveau créneau : celui de l’information tendancielle à destination de l’ensemble du secteur de la mode. Sur la base de centaines de milliers de demandes, il était en effet possible de dégager des tendances exploitables par le secteur. Ce fournisseur, ici, est un innovateur en matière d’anticipation de ce que veut le marché. La relation se complexifie : la demande du client est une information pour le fournisseur, mais le fournisseur, lui aussi, dispose d’informations exploitables par toute une série de clients. Ou comment la politique d’achats, de plus en plus, se trouve au cœur de l’innovation… ● BECI - Bruxelles métropole - mars 2016 23

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