Transition Un curateur pour l’économie productive L'économie productive renaît à Bruxelles. Au fil des cinq dernières années, elle a connu un véritable essor, avec un nombre croissant de projets et de start-ups. Comment Bruxelles peut-elle soutenir ces entreprises manufacturières innovantes, sans perdre de vue les autres besoins urbains ? L a production est inscrite dans l'ADN de Bruxelles, depuis l'industrie textile médiévale jusqu’à l'apogée de la révolution industrielle au 19e siècle. Après un demi-siècle de déclin, cette économie productive urbaine est de retour : bière, chocolat, voitures sont produits à Bruxelles, sans oublier la construction, les nouvelles technologies ou la gestion des déchets. Le secteur productif crée à nouveau des emplois en ville. Les Bruxellois redécouvrent leur passé industriel et réapprennent à vivre avec des industriels pour voisins. L'intérêt pour l’économie productive s'est accru, grâce à un certain nombre d'initiatives publiques et privées. Bruxelles a été l'une des premières villes à lancer son propre plan en faveur de l'économie circulaire et, plus récemment, en faveur de l'industrie. Cette politique s'est traduite par la croissance du nombre de start-ups et de projets innovants, notamment dans la construction et l'agroalimentaire. L'Abattoir, par exemple, est aujourd'hui l'un des plus grands bâtiments d'Europe à posséder des serres urbaines intégrées, mais aussi une champignonnière souterraine, tout en abritant un micro-incubateur vert et une entreprise qui transforme les légumes invendus en soupes. Greenbizz offre un autre exemple de hub de production. Le succès de l’industrie urbaine crée cependant des tensions avec d'autres fonctions. Logement, parcs, bureaux… : l'espace est rare et les acteurs se le disputent. Selon les recherches de Sarah De Boeck, à la VUB, Bruxelles a perdu environ 16 % des surfaces consacrées à la logistique ou à la production au cours des 18 dernières années. Un curateur pour le territoire Le projet ‘Cities of Making’ identifie comme principal défi l’isolement et le manque de coordination dont souffre le secteur productif. Aujourd'hui, il n'y a pas d’acteur unique mandaté pour le soutenir et accompagner son développement. Pas d’acteur unique qui réunisse les entreprises, fournisse une meilleure infrastructure ou relie l'économie de la connaissance à l'économie de production. Et pas d’acteur unique pour contrarier la gentrification des sites de production et offrir des alternatives afin de réaménager des sites industriels abandonnés. Un tel acteur, un « curateur du territoire », pourrait réunir des « penseurs », des « faiseurs », le secteur public et le privé. C'est un rôle essentiel. Ce curateur pourrait contribuer au développement du secteur productif, mais surtout présenter une vision et des objectifs alignés. Mais comment ? S'agirait-il d'une agence publique, d'une asbl ou d'une entreprise privée ? Voyons à l'étranger. Vienne, la capitale autrichienne, ville pionnière dans la protection de son secteur manufacturier, lancera en janvier 2020 un partenariat public-privé entre l'agence économique publique de Vienne et la Chambre de Commerce d’Autriche. Résultat : les 'Vienna Business Districts', qui divisent la ville en trois zones, chacune avec un directeur commercial. L'asbl londonienne The Guardian of the Arches, fondée après la vente des anciens ponts ferroviaires, contribue à installer de petites entreprises sur les sites les plus accessibles. Les parcs d'activités flamands ont leur propre gestionnaire, avec des résultats intéressants. Et aux USA, l'Urban Manufacturing Alliance fournit soutien et connaissances aux PME. Bruxelles ne doit pas attendre que le secteur productif s'aide lui-même. Les acteurs sont nombreux, mais il nous faut une organisation qui soit investie des intérêts du secteur. Nous devons tirer parti de nos atouts et veiller à ce que l’économie productive participe à construire le Bruxelles du 21e siècle. ● Adrian Hill, Coordinateur de Cities of Making 40 ❙ Bruxelles Métropole - décembre 2019 © Belga
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