Green Alexis Pierrard, lauréat de BeCircular. des corps de métiers, mais aussi auprès des donneurs d’ordres. Et Marie-Laure Maerckx d’évoquer cette histoire de vieux parquet que le propriétaire d’un immeuble en réfection a finalement décidé de garder, alors que ce n’était pas prévu. Bien sûr, cela implique parfois un allongement de la durée du chantier, voire un accroissement budgétaire, mais visiblement, le réflexe semble désormais s’installer dans les esprits. Matériaux faciles à déconstruire Tous ces changements s’appuient sur la volonté farouche de certains entrepreneurs et donneurs d’ordres de faire les choses différemment. Mais il faut admettre que le mouvement, amorcé par la Région, encadré par Bruxelles Environnement et techniquement relayé par des organismes comme la Confédération Construction, a grandement aidé les porteurs à sortir des zones d’incertitude qui persistaient. Voici peu, les actes des séminaires Bâtiment durable 2019 ont été publiés. Ils constituent une véritable mine pour qui veut véritablement composer de manière durable avec la construction ou la rénovation de son bâtiment. Ambroise Romnée, Project Leader au Centre Scientifique et Technique de la Construction : « Les expériences que nous avons pu suivre sur le terrain nous ont permis d’établir le b.a.-ba. de la construction circulaire à partir de principes simples, 42 ❙ Bruxelles Métropole - juin 2019 comme de minimiser les types de matériaux différents, éviter les composites inséparables, mettre en adéquation la durée de vie des matériaux avec la strate fonctionnelle, mais aussi de jouer totalement la carte de la réversibilité avec une approche modulaire, préserver une bonne visibilité des points de connexion ou encore préférer des matériaux préfabriqués, avec des matériaux de construction qui soient faciles à manipuler et à déconstruire. Il s'agit en effet de donner au bâtiment le maximum de possibilités pour s’adapter à un environnement souvent changeant, et se projeter à la fin de la première vie du bâtiment ». En disant cela, le CSTC ne dit rien d’autre que ce que disait déjà Le Corbusier, ce grand monsieur de l’architecture, qui a très clairement été le premier à écrire les fondements de la construction circulaire (voir encadré). Urban mining et économie servicielle Selon Ambroise Romnée, s’engager dans un projet de construction circulaire, c’est assurément prendre le projet à l’envers, en commençant... par la fin, là où on penserait devoir fonctionner très en amont. C'est évidemment aussi, encore et toujours, éviter la production de déchets et les émissions de gaz à effet de serre. En Région de Bruxelles-Capitale, il faut le savoir, le secteur génère environ un tiers de tous les déchets. Cela représentent tout de même 645.000 tonnes par an, souligne l'ingénieur. Mais ce qui est véritablement neuf avec cette démarche, c’est que ‘l’urban mining’ amène à mobiliser beaucoup plus de main-d’œuvre plus ou moins qualifiée, en amont et en aval du chantier : « Pensons notamment à la manutention, au stockage, au reconditionnement, à la documentation, à la promotion et à la revente (ndlr : des matériaux récupérés). De même, la mise sur le marché d’éléments de réemploi s’organise autour de plusieurs fonctions : logistique (magasinier, transport...), documentaire (description et recherche d’informations sur le produit), technique (réparation et remise en état, documentation technique) et la fonction commerciale avec de la vente, des commandes, de la comptabilité et même du service après-vente ». Bref, l’économie circulaire créée aussi de l’emploi, en tapant sur le clou des services. ● Johan Debière Le Corbusier, véritable initiateur de la construction circulaire En privilégiant la modularité, et surtout en pensant cette modularité dans ses moindres détails, Le Corbusier pensait les vies du bâtiment, ou plutôt les différents usages qu’il pourrait avoir tout au long de ses différentes vies. Pour le célèbre architecte, il était en effet important d’arrêter de concevoir les constructions de manière monomaniaque, avec une répartition des usages, une distribution des espaces qu’on croirait pensée « à usage unique ». Fini le salon qui restera un salon, la cuisine qui, pensée comme une cuisine, et ne pourra jamais être qu’une cuisine et les chambres qui ne pourront jamais être rien d’autre que des chambres. Idem pour les immeubles tertiaires, avec des bureaux qui peuvent un jour devenir des logements, et des espaces de stockage qui peuvent être transformés en lofts. D.R.
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