THINK TANK l’opportunité socio-économique et stratégique pouvait se douter qu’il serait en charge des études ultérieures si la première étude ‘révélait’ que la solution métro était la meilleure. Il était donc de leur intérêt de recommander cette solution et d’écarter les alternatives, soit les offres de surface. On aurait souhaité des expertises indépendantes. » Laurent Schiltz, secrétaire général de la Confédération Construction, voit aussi dans cette ligne 3 un projet très favorable à la vitalité de l’économie bruxelloise et apporte des précisions chiffrées : « À la demande de notre Fédération des grandes entreprises et des entreprises de génie civil (ADEB), la VUB a réalisé une étude visant à évaluer l’impact des investissements des grands travaux, notamment d’infrastructures, sur l’économie belge. Il y apparaît que 100 millions d’euros investis dans les infrastructures génèrent 97,68 millions de valeur ajoutée, 24,79 millions d’investissements supplémentaires, 23,09 millions de rentrées publiques et 1.304 équivalents temps-plein ! Sachant par ailleurs que plus d’un emploi sur deux dans le secteur est localisé dans la Région de Bruxelles-Capitale, on peut dire que l’effet de levier d’un euro investi dans la construction est largement supérieur à celui d’un euro investi dans n’importe quel autre secteur. » Des travaux dont l’ampleur et la durée font peur L’ampleur des travaux, précisément, est une autre source de réticences. On sait qu’au boulevard de Stalingrad, la perspective de sept ans de chantier pour construire la nouvelle station Constitution glace les commerçants. « Il est évident que l’on ne construit pas un métro sans faire de trou et qu’il y aura un impact », reprend M. de Meeûs. « Mais pour le minimiser, le gouvernement a opté pour la technique du tunnelier (pour la partie Bordet-Nord) qui ne nécessite pas d’ouverture de voirie, hors station. Elle est plus efficace dans des quartiers densément bâtis car elle permet d’éviter la démolition d’îlots entiers. Elle provoque peu ou pas de nuisances en surface (tassement, bruit, vibrations) en raison de sa profondeur. » « Le choix d’œuvrer par percement de tunnel, qui semble en fait un choix préalable à toute étude, est discutable », objecte Frédéric Dobruszkes. « Les arguments avancés le sont certainement lorsqu’on oppose un travail souterrain indolore à des travaux de surface qui ‘rasent des îlots entiers’ ; c’est de la désinformation, car percer un tunnel comporte d’autres aléas et fait courir des risques à tout ce qui est au-dessus du percement. Des travaux à partir de la surface n’impliquent pas de démolitions apocalyptiques s’ils suivent le tracé des rues. Par ailleurs, le chantier requerra malgré tout beaucoup d’ouvertures de sol : sept stations de métro à construire, des cheminées d’aération à percer, l’entrée et la sortie de la machine, etc. Enfin, cela implique que le réseau et les stations seront à 30 m sous la surface : le temps d’entrée et sortie des stations rendra le métro moins attractif. » 20 BECI - Bruxelles métropole - novembre 2017 Brieuc de Meeûs Nouveaux modes de mobilité « Je pense que 2 milliards d’euros seront mal dépensés (le ratio coûts/bénéfices est a priori très mauvais) et sans même nécessairement profiter aux entreprises bruxelloises ou belges de travaux publics », conclut M. Dobruszkes. « Le projet de métro nord n’a pas été réellement comparé avec d’autres projets d’infrastructures possibles, y compris de métro, de sorte qu’un projet plus pertinent aurait pu éventuellement émerger. Il se pourrait, par exemple, qu’une extension de la ligne Simonis jusqu’à Grand-Bigard avec création d’un très grand parking à la sortie de l’autoroute E40, puisse avoir un plus grand impact sur la mobilité et sur la qualité de l’air à Bruxelles. » Enfin, si le métro nord est effectivement livré dans dix ans, on peut se demander dans quelle mesure auront évolué entretemps les modes et usages de mobiliLe Grand Paris Express, ce sera 200 km de lignes et 68 gares et à Bruxelles nous tergiversons pour 5 km de métro ! té : vélo électrique, voitures partagées, etc. Mais pour Brieuc de Meeûs, le développement de ces moyens de transports alternatifs ne fait que prouver à quel point les besoins de mobilité sont criants à Bruxelles : « Le vélo ne résoudra pas à lui seul les problèmes de mobilité ! Je vous invite à regarder ce qui se fait à Paris pour renforcer la pertinence de notre investissement. Le Grand Paris Express, ce sera 200 km de lignes et 68 gares et à Bruxelles nous tergiversons pour 5 km de métro ! » Le Grand Paris, justement, dérape budgétairement : quel risque chez nous ? M. de Meeus l’affirme : « La Région, qui investit le plus, a mis en place via un comité de pilotage et une enveloppe hyper découpée, un système de contrôle extrêmement strict des coûts qui exclut tout dépassement budgétaire. De son côté, Beliris a budgété 50 millions par an et ne versera pas un euro en plus de cette enveloppe. » ● © Reporters
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