THINK TANK POUR OU CONTRE Des limites aux manifestations à Bruxelles ? 898 manifestations ont battu les pavés bruxellois en 2016. Leur prolifération affecte l’économie locale et la liberté de mouvement des riverains. Des voix s’élèvent aujourd’hui en faveur d’une réglementation plus stricte. Peut-on par exemple limiter les plages horaires et les parcours ? Faut-il interdire la présence de véhicules dans les cortèges ? Peter Van Dyck Freddy Neyts, président de la LVZ (Fédération libérale des Indépendants) de la RBC et de l’Open VLD Brussel Chaque année, une centaine de manifestations font défiler des dizaines de milliers de personnes de Bruxelles Nord à Bruxelles Midi via les boulevards du centre. Les commerçants locaux et les navetteurs trinquent. À chaque fois, la police déconseille de se rendre à Bruxelles en voiture. Les clients et les travailleurs se font donc rares, au détriment de notre économie. Je plaide pour une étude approfondie des dommages économiques qu’infligent les manifestations. Nous devrions aussi réfléchir avec des juristes et les organisations sociales à une éventuelle taxe de manifestation par laquelle chaque manifestant allégerait les coûts de sécurisation et de nettoyage. La visite du président Trump a donné lieu à des mesures exceptionnelles, notamment une zone neutre, interdite aux manifestants. Pourquoi ne pas prévoir systématiquement de telles dispositions ? Par ailleurs, les organisateurs pourraient opter pour une manifestation « indoor » ; cela n’entraverait en rien le rôle des médias en tant que porte-voix du message des manifestants. En fin de compte, c’est le but. Je prône en outre une limitation de la durée des actions de protestation. Et une limitation du nombre de manifestations dans chaque commune doit être envisageable. L’Unizo propose de n’autoriser les manifestations que le dimanche. Cela ne nous semble pas une bonne idée. Les Bruxellois et les touristes doivent pouvoir se déplacer librement durant le week-end. Et puis, pourquoi concentrer toutes les manifestations à Bruxelles ? Elles pourraient s’exprimer plus souvent à Anvers ou Liège. Soyons clair : en tant que démocrate, je suis le premier à défendre le droit de manifester. Il n’empêche : j’estime que le bourgmestre et la police doivent imposer des règles qui limitent les désagréments pour les citoyens. Pourquoi ne pas exiger que les manifestations se fassent exclusivement à pied ? Des cortèges comportant des tracteurs, des taxis ou des camions qui paralysent tout le trafic, voilà des situations que nous ne pouvons plus tolérer. 16 BECI - Bruxelles métropole - septembre 2017 Guy Depraetere, secrétaire général de l’Algemeen Boerensyndicaat (syndicat des agriculteurs) Il faut reconnaître, en démocratie, le droit au peuple de s’exprimer. Alors qu’en Turquie, la démocratie est compromise, l’Europe doit continuer à donner l’exemple. Si on nous oblige à nous faire entendre à Anvers ou à Charleroi, c’est là que nous provoquerons des nuisances. Où que nous allions, la mobilité est le talon d’Achille que nous exploitons. Nous déplacer, c’est déplacer le problème. Et puis, notre décision de manifester à Bruxelles n’est pas fortuite. C’est là que sont établis les gouvernements fédéral, flamand et bruxellois, sans oublier la Commission européenne. C’est à ces instances que nous nous adressons. Un sommet européen constitue souvent pour nous l’occasion de descendre dans la capitale. Inutile de nous demander de venir manifester un autre jour ! Toutes nos manifestations se déroulent en concertation étroite avec la police. L’anarchie des années 70 n’a plus cours. Nos manifestations des dix dernières années se sont déroulées sans débordements. Il n’y a pour ainsi dire pas eu de vandalisme ou de destructions. D’ailleurs, presque tout est filmé, aujourd’hui. Celui qui commet des excès dans un cortège de manifestants sait qu’il devra payer la note. Les grandes manifestations d’agriculteurs mobilisent parfois des tracteurs, dont je sais qu’ils sèment la pagaille en ville. Mais tentez de comprendre : un agriculteur qui parcourt parfois des centaines de kilomètres à bord de son tracteur pour venir manifester à Bruxelles exprime sa profonde colère. N’oubliez pas que le tracteur revêt une valeur symbolique dans notre secteur. Et puis, l’agriculteur qui manifeste à bord de son tracteur se sent plus fort dans l’expression de la protestation, parce qu’il ne peut pas être ignoré. Des accords bien définis sont conclus avec les forces de l’ordre pour un bon déroulement des manifestations. Lorsque la police nous demande de suivre un parcours alternatif pour réduire les problèmes de trafic, nous obtempérons. Notre but est de nous faire entendre. Mais s’il vous plaît, épargnez-nous d’autres règlements encore. Il y en a déjà plus qu’assez. © Reporters
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