SPEAKER’S LE MOIS ÉCONOMIQUE RIEN NE VA PLUS Tant pis pour ceux qui assimilent la Bourse à un casino. Ils seront frustrés. Non, ce n’est pas en Bourse que rien ne va plus, c’est dans l’économie. Nos modèles sont dépassés. | Jean Blavier Votre serviteur partage (modestement) avec un des économistes belges les plus connus une sensibilité, une intuition : l’économie, c’est d’abord de l’anthropologie. Les chiffres ? Ne provoquons pas les mânes de Walras, ne cherchons pas la petite bête chez les tenants des modèles stochastiques d’équilibre général. Ni chez les fanas des graphes colorés, pas plus que chez les disciples de la mathématique boursière qui vous enseignent à l’université que, pour calculer le prix d’une option, il suffit de se remuer les méninges avec la petite merveille de mécanique suivante : P (σ) = C0 F (g1 (C0)) – Ce-rT g1 (x) = ln (x/C) + (r + σ2 /2) σ √T g2(x) = g1 (x) - σ √T F (x) = ∫x - ∞e-v2/2dv2∏--√. Tout cela revient à vous dire quel temps il fera demain sur la base d’une étude du passé qui montre que, statistiquement, la probabilité la plus forte est que les nuages de beau temps suivent les cirrostratus si, et seulement si, les perruches du bois de la Cambre volent bas. Les mécanismes sophistiqués qui sont censés nous expliquer comment fonctionne l’économie réelle, comment on peut la stimuler, et surtout comment on peut en tirer un profit financier et social se sont enrayés comme la mitraillette Sten des assassins de Reinhard Heydrich. Au plus mauvais moment. Bref, rien ne va plus. Pourquoi ? Une première raison tombe sous le sens : ces modèles sont de moins en moins fiables. Le héros, en bourse, ce n’est pas le énième Pic de la Mirandole, mais un Warren Buffett qui explique son succès par la confiance qu’il accorde au management de cinq ou six entreprises dont il suit les comptes depuis des années. Les efforts des banques centrales, dont la nôtre, font peine à voir. Les multiples injections de supercarburant dans le réservoir du moteur économique ne donnent que des pétarades dignes de la Fiat 509 de Gaston Lagaffe. Alors que tout le monde attend. Attend de voir redémarrer l’économie et la voir générer les emplois qui, enfin, remettront sur les rails une société occidentale financièrement déséquilibrée et socialement rongée par un « désemploi » qui traîne depuis trente ans. Mais que fait la police ? Tout. Quoi que disent les « y’a qu’à faut qu’on », on a quasiment tout essayé, mais nous nous accrochons à ce rêve du plein emploi qui a autant de chances de revenir en force que le twist ou les pattes d’eph’. Le modèle ne marche plus. Dans notre pays et ses 600.000 sans emploi, dont 100.000 rien qu’à Bruxelles, il est très rare de voir surgir comme une comète à la queue argentée un centre commercial (le néo-orthophonique F (g2 (C0 )), dans laquelle Docks Bruxsel) qui, d’un coup, recrute 1.000 personnes. Sincèrement, chapeau bas devant Docks et Equilis, son promoteur (carolorégien), mais ça ne va jamais faire fondre le chômage que de 1 % à Bruxelles et de 0,16 % au niveau du pays. Et des Docks, il y en a combien par an... euh, pardon, par décennie ? Surtout quand on sait, pour l’avoir lu dans un communiqué de presse d’Actiris, que si le chômage a (enfin) baissé de 2 % à Bruxelles, c’est notamment grâce aux exclusions. Bref, les exclusions réduisent davantage le chômage que des audacieux projets comme Docks. Étonnant ? Non, on fait la même chose aux États-Unis. Si le chômage a fondu là-bas (il est de 5 % et on ose appeler ça du plein emploi), c’est aussi, et peut-être surtout, parce que des cohortes de demandeurs d’emploi ont quitté le marché du travail. Pour aller où ? Mystère. Ils ne sont plus dans les projecteurs des statistiques du chômage, donc ils n’existent plus. Ah si, peut-être dans les rangs de la pauvreté montante. Mais ça, c’est une autre rubrique. Not my problem. Non seulement nos modèles ne fonctionnent plus, mais en plus leur maquillage désespéré a quelque chose d’odieux. ● CORNER Vous voulez faire partie d’un réseau d’entrepreneurs dynamiques ? Wenst u in een netwerk van dynamische ondernemers te worden opgenomen? www.beci.be/sign_up_to_newsletter/ Chambre de Commerce de Bruxelles Kamer van Koophandel Brussel Avenue Louise 500 Louizalaan 1050 Bruxelles-Brussel BECI - Brussels Business - avril 2015 5
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