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THINK TANK Préserver l’équilibre budgétaire Le vrai problème se situe dans le Traité de Lisbonne et l’article 126 de son Traité de Fonctionnement, qui définit que la dette de l’État ne peut pas dépasser 60 % du produit intérieur brut (PIB) et que le déficit budgétaire annuel ne peut pas excéder 3 % du PIB. Cette discipline budgétaire complique le financement des travaux d’infrastructure. Le SEC n’a fait que rendre les investissements publics plus compliqués encore, déclarent les bourgmestres bruxellois. Avant l’an 2000, ils fonctionnaient par étalement de la charge de la dette : le montant d’un prêt pour investissement était enregistré comme un revenu dans un budget extraordinaire, tandis que le remboursement se faisait sous la forme de dépenses reportées aux budgets ordinaires suivants. « Le processus était ainsi sous contrôle et parfaitement efficace », déclare Olivier Maingain, bourgmestre de Woluwe-Saint-Lambert. Pénalisation Le SEC stipule que les prêts pour investissement doivent être imputés comme dépenses au cours de l’année où ils ont été obtenus. Il faudra donc les mettre en balance avec les revenus de l’année en cours, ou les rembourser immédiatement. Par ailleurs, la distinction entre budget ordinaire et extraordinaire n’a plus cours. La « débudgétisation », cette vieille habitude de nos pouvoirs publics, n’est donc plus autorisée. On pourrait bien sûr ne pas tenir compte des critiques formulées par la Cour des Comptes quant à un excès de débudgétisation. La France s’est déjà permis cette audace. La Belgique, elle, ne peut pas se permettre grand-chose. Elle est déjà dans le collimateur en raison d’un déficit budgétaire de plus de 3 % en 2009. La Commission européenne a annoncé l’arrêt de la procédure contre la Belgique en juin 2014, en échange d’un accord strict de réduction continue du déficit. Dévier de cette trajectoire aujourd’hui relèverait de la pure provocation. Un problème historique Frans De Keyser, conseiller BECI, estime que la Belgique souffre d’un problème historique. Depuis les gouvernements Verhofstadt (1999-2008), les budgets d’investissement ont été rabotés pour préserver la sécurité sociale. Le déficit autorisé à concurrence de 3 % du PIB (norme de Maastricht) avait pour objectif de permettre les investissements, mais Guy Verhofstadt et consorts s’en sont servis pour combler les trous de la sécurité sociale. La priorité allait aux dépenses courantes, plutôt qu’aux investissements. C’est pourquoi les tunnels ont été abandonnés à leur sort pendant tant d’années. M. De Keyser trouve peu courageux de la part des bourgmestres bruxellois de se justifier par la SEC 2010. Il admet leurs difficultés à faire financer des investissements, mais celles-ci découleraient surtout de l’obligation imposée par le Ministre bruxellois des Finances Guy Vanhengel de procéder à une évaluation des biens immobiliers des communes, ce qui influe sur la capacité d’emprunt de la Région bruxelloise. Bref, il y a toujours eu, tant au niveau 14 BECI - Bruxelles métropole - avril 2016 Frans De Keyser national qu’à l’échelle locale, une attitude très ambiguë à l’égard des investissements publics. Les réformes de l’État n’ont pas simplifié les choses : lors du transfert de compétences, telles que celle des infrastructures routières, les budgets d’investissement auraient pu être majorés, mais les décideurs politiques se sont abstenus de le faire. Collaboration public-privé La décrépitude des tunnels bruxellois n’est pas subite. En 2013 déjà, des plans prévoyaient la rénovation du tunnel Léopold II. En dépit de la promesse solennelle de la Ministre bruxelloise des Travaux Publics, Brigitte Grouwels, de prendre une décision en 2015 et de débuter les travaux l’année suivante, la procédure s’est complètement enlisée. Coût annuel de l’entretien des tunnels bruxellois : environ 40 millions d’euros. Les pouvoirs publics ont sans doute estimé chaque année ne pas avoir les budgets. Dieter Van Hassel, Business Development Director de BAM PPP (l’entreprise de PPP au sein du groupe BAM), explique les perspectives d’un financement alternatif via des contrats DBFM (Design, Build, Finance, Maintain). Il est convaincu que si les tunnels avaient été entretenus par une entreprise privée via un contrat DBFM, ceux-ci seraient aujourd’hui en bien meilleur état. « Le DBFM sous-traite l’entretien pour une durée de 25 à 30 ans, le tout pour une redevance annuelle partiellement indexée. De quoi éliminer toutes les factures inattendues pendant trois décennies. C’est également avantageux d’un point de vue fiscal : le DBFM est un contrat de service, pas un contrat d’investissement qui pèse sur la dette publique. » Transition Dieter Van Hassel admet que la norme SEC 2010 et le DBFM sont complexes. On ne peut pas reprocher aux politiciens de ne pas les maîtriser dans leurs moindres détails. Pourtant, plusieurs pouvoirs publics belges s’efforcent déjà de structurer des projets DBFM en vue d’une

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