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THINK TANK POUR OU CONTRE La boîte noire dans l’horeca ? D’ici fin décembre, les restaurants belges devront tous être équipés d’une caisse enregistreuse à module fiscal – la « boîte noire », qui doit limiter les possibilités de fraude. Deux avis nuancés : c’est « oui mais » pour Roland Debuyst, tandis qu’Yvan Roque souhaite la suspension. Adrien Dewez Roland Debuyst, Administrateur de la Belgian Restaurants Association (B.R.A.) La B.R.A. n’a jamais été demandeuse d'un outil aussi draconien, mais ce serait un combat d'arrière-garde que de demander la suppression d'un système approuvé par trois gouvernements successifs. La « black box » a pour vocation d'éliminer le travail en noir et la concurrence déloyale, qui sont des objectifs auxquels nous souscrivons. Nous voulons aussi valoriser nos entreprises sur la base de bilans transparents. Mais les dés ne doivent pas être pipés ; un restaurant qui joue le jeu doit pouvoir survivre. En l'état, nous craignons que le système n'élimine les moyennes structures, ne laissant subsister que les très petites et celles de taille industrielle. Le risque existe que certains restaurants, pris à la gorge, s'enfoncent plus encore dans une économie souterraine. Nous négocions depuis deux ans avec les Ministres de tutelle (six en tout !). Nous avons déjà obtenu des avancées, dont un changement du régime du travail étudiant, un meilleur système d'heures supplémentaires, voire les « flexi-jobs ». En outre, les restaurants peuvent bénéficier d'une réduction de charges ONSS pour leurs cinq premiers travailleurs, à condition que le personnel utilise la black box pour pointer (ce à quoi nous sommes opposés, car elle ne doit pas être utilisée comme un mouchard social). Nous demandons des mesures incitatives plutôt que coercitives, qui assurent la viabilité économique des restaurants – pour rappel, pas moins de 40.000 établissements en Belgique. Nous demandons donc que, parallèlement à la black box, le gouvernement diminue les cotisations patronales – un pas important est annoncé dans le cadre du « tax shift », mais il faut vérifier que la diminution de 33 à 25 % s’applique effectivement aux bas salaires – ainsi qu'une baisse de la TVA de 12 à 6 % pour la nourriture et les boissons non alcoolisées. Nous souhaitons aussi un pacte avec l'administration : fini les contrôles durant les heures de service en prenant la clientèle en otage. Et enfin, permettre aux particuliers de déduire fiscalement des dépenses au restaurant. Nous avons proposé un montant de 20 % de l’addition avec un maximum de 100 euros par mois qui encouragera l'activité économique. Yvan Roque, Président de la fédération horeca de Bruxelles Si la boîte noire part d'une bonne intention, elle risque de plonger l'horeca dans de graves problèmes si un nouveau système économique et social n'est pas mis en place pour assurer la viabilité des établissements. En tant que Bruxelles Horeca, nous sommes naturellement demandeurs d'assainir le secteur. Le gouvernement souhaite davantage de contrôle de celui-ci. Bon, nous ne sommes pas contre le système de caisse enregistreuse en tant que système de contrôle, mais il doit être assorti d'une réelle réflexion, notamment sur le coût du travail et le prix que le client est disposé à payer dans un établissement. Nous avons investi pour réaliser des études avec des universités et les résultats sont sans équivoque : les mesures compensatoires ne sont pas suffisantes pour assurer la viabilité de l’horeca. Et il y a un réel risque que ces mesures soient attaquées par l'Europe, notamment en vertu d'inégalité avec d'autres secteurs. On ne peut pas demander à des gens qui prennent des risques, investissent, recrutent du personnel, de payer autant en charges. C'est un véritable problème, elles sont devenues impayables dans ce pays. Et les restaurateurs font face à de sérieuses difficultés en cas de maladie ou dans le recrutement de personnes compétentes. Sans compter qu'il n'y a plus de période d'essai. Il faut que le secteur soit en phase avec la société d'aujourd'hui. Nous, nous demandons au gouvernement de suspendre la mesure car nous ne savons pas où nous allons. Nous avons d'ailleurs introduit un recours en annulation. L'horeca est un grand pourvoyeur d'emploi, notamment dans des profils de jeunes peu qualifiés. Et le secteur joue un grand rôle dans l'attrait touristique du pays et de la capitale. Il faut un véritable débat sur le coût du travail. C'est un nouveau système qu'il faut créer, doté d'une visée nouvelle, qui permette à l'horeca d'être viable, de continuer à engager du personnel et de proposer un travail de qualité. De plus en plus de personnes recherchent d'avantage de flexibilité vis-à-vis de leur boulot ; ça peut être un bon point de départ dans l'élaboration de ce nouveau système. 6 BECI - Bruxelles métropole - septembre 2015 Donnez-nous votre avis

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